A l’Opéra de Paris jusqu’au 4 janvier 2025
Des fêtes tout en danse à l’Opéra de Paris
« Paquita » à la Bastille, « Play » à Garnier, les deux maisons de l’Opéra national de Paris remettent à l’affiche des ballets à succès.
Flamboyantes espagnolades à la Bastille. Escapades ludiques à Garnier… Le programme des fêtes des deux maisons de l’Opéra national de Paris s’annonçait sous les meilleurs auspices. Las, un mouvement de grève lancé par les représentants du Ballet de l’Opéra pour mieux prendre en compte dans leur rémunération le temps de préparation des interprètes (habillage, maquillage, échauffement…) a affecté les premières représentations des deux pièces début décembre. Depuis, les spectacles ont repris et le préavis a été levé.
Le manque à gagner est d’autant plus préjudiciable pour les finances de l’institution nationale que cette programmation de fêtes promettait d’être très rentable, la période de fin d’année correspondant habituellement à un pic de fréquentation. Les deux spectacles à succès repris sont sans risques et sans frais de production nouveaux, donc facilement amortissables.
Paquita à l’Opéra Bastille. Exotique en diable, ce ballet-pantomime en deux actes et trois tableaux, créé à l’Opéra de Paris en 1846, dans une chorégraphie de Joseph Mazilier, sur une musique de Deldevez, est le fruit d’un long héritage. Après avoir enchanté Théophile Gautier à sa création, le ballet tomba peu à peu dans l’oubli en France. En Russie, il en fut tiré par Marius Petipa qui en 1882 remania des figures, en ajouta d’autres sur des musiques additionnelles de Minkus. Il est repris ici dans la version recréée en 2001 pour le Ballet de l’Opéra de Paris par le regretté danseur et chorégraphe Pierre Lacotte, disparu l’an dernier.
L’intrigue sans aucune conséquence situe l’action en Espagne pendant l’invasion napoléonienne. La jeune et pétulante danseuse Paquita enlevée dans sa petite enfance par des gitans éconduit un aristocrate, Lucien d’Hervilly, qu’elle estime au-dessus de sa condition. Mais après avoir tiré le fringant officier d’un complot ourdi par le gouverneur espagnol, elle découvre qu’elle est d’extraction noble. Après moult péripéties, le happy end est au rendez-vous.
Tout cela n’est que prétexte à somptueux décors et fastueux costumes. Pantomimes et danses de caractère se succèdent à vive allure, exigeant des interprètes une technicité sans faille et une vivacité soutenue. Le tourbillon musical étourdissant enchaîne valses, mazurkas, quadrilles, galops… donnés en live par l’Orchestre de l’Opéra de Paris dirigé avec fougue par Mikhail Agrest. Le tout culmine en apothéose lors d’un fabuleux grand bal.
Des étoiles de grande classe défendent en alternance les rôles de Paquita et de Lucien d’Hervilly : Léonore Baulac et Marc Moreau, Valentine Colasante et Guillaume Diop. Mais tout le corps de ballet n’est pas en reste, rivalisant d’énergie, de virtuosité et de grâce. Apparaissant de manière inattendue, les tout jeunes élèves de l’École de Danse s’imposent et font fondre le public dans la piquante mazurka du second acte.
Play au Palais Garnier . « Donnons-nous l’autorisation d’être fous, d’oublier le quotidien de nos vies, d’avoir du plaisir à profiter ensemble du moment présent », tel est le programme proposé par Alexander Ekman dans cette pièce créée en 2017 au Palais Garnier et reprise telle quelle aujourd’hui. Un « nous » qui englobe aussi bien les interprètes qui s’en donnent à cœur joie, que le public, qui se prête volontiers au jeu.
Le chorégraphe suédois qui a galvanisé l’Ouverture, à la Concorde, des Jeux Paralympiques de Paris, explore avec les quarante danseurs du Ballet de l’Opéra différentes manières de jouer en dansant. Et il embarque le public dans la même trajectoire ludique qui tranche avec le décor on ne peut plus compassé de l’Opéra Garnier. Prenant prétexte que la racine du mot « jeu » en allemand est « Spiel », qui veut dire « mouvement de danse », il interpelle les adultes et se demande ce que nous avons fait des jeux de notre enfance.
Sur la scène, des tableaux oniriques rythmés par la musique jazzy de Mikael Karlsson, font intervenir une foule d’accessoires inattendus. Adieu tutus et toiles peintes, adieu guimauve et sirop, vivent shorts et polos pour s’ébattre dans la piscine remplie de balles vertes, s’époumoner avec des cordes à sauter, se lancer des ballons de baudruche, ou partir dans des courses-poursuites à en perdre haleine…
Avec une énergie bluffante et communicative, les danseurs finissent par déborder du cadre de la scène et bondissent du plateau jusqu’aux travées des spectateurs qui les accueillent à bras ouvert, et vice-versa. Appelé à renvoyer la balle (au sens propre du terme), le public ébahi et ravi ne se tient plus de joie.
Paquita à l’Opéra Bastille, Play au Palais Garnier, jusqu’au 4 janvier 2025, https://www.operadeparis.fr
Avec les Étoiles, les Premières Danseuses, les Premiers Danseurs et le Corps de Ballet de l’Opéra de Paris
Paquita. Adaptation et Chorégraphie : Pierre Lacotte, d’après Joseph Mazilier et Marius Petipa. Décors et costumes : Luisa Spinatelli. Lumières : Nicolas Fischtel. Direction musicale : Mikhail Agrest
Play. Chorégraphie et décors : Alexander Ekman. Musique : Mikael Karlsson. Costumes : Alexander Ekman, Xavier Ronze. Lumières : Tom Visser. Vidéo : T.M. Rives. Chanteuse : Calesta « Callie » Day
Photos : Maria-Helena Buckley, Ann Ray
N.B. En cas d’annulation d’une représentation, une annonce est faite sur le site de l’Opéra dès qu’elle est officielle. Les spectateurs qui ont déjà pris leur place sont prévenus par SMS.
