L’éducation de Rita de Willy Russell
Un duo drôle et énergique.
La pièce de Willy Russell a été créée en 1980 à Londres par le Royal Shakespeare Compagny. Elle est un classique du théâtre moderne britannique jouée depuis plus de quarante ans en Angleterre.
L’histoire se situe à Liverpool, dans le bureau de Franck, un professeur de littérature, désillusionné et alcoolique. Il semble regretter d’avoir accepté de donner des cours du soir. Son étudiante est une jeune femme de 29 ans, Rita, coiffeuse, qui veut « tout savoir », « changer de l’intérieur » pour échapper à son milieu qui l’étouffe. Elle est l’inverse de Franck. Rita est inculte, énergique, enthousiaste et sans filtre. La première rencontre est révélatrice du fossé qui sépare ces deux êtres et donne lieu à des échanges fort drôles.
Au fil des rencontres, les deux personnages vont se découvrir et s’apprécier. Rita est toujours aussi directe et sa persévérance pour parvenir à rédiger une dissertation correcte est touchante. Elle livre quelques confidences sur sa vie privée avec son mari qui voudrait qu’elle arrête les cours car il sent bien qu’elle lui échappe. Progressivement, Rita découvre le théâtre, prend plaisir à des lectures plus difficiles et réussit à s’exprimer selon les codes universitaires pour passer ses examens. De son côté, Franck cynique au début, est séduit par la sincérité , la ténacité et les progrès de Rita.
Les deux comédiens sont parfaits dans leurs rôles. Owen Doyle, donne à son personnage, le côté british parfait, exprime avec retenue les remarques caustiques, l’amusement, l’inquiétude et la tendresse que lui inspire Rita. Avec finesse, il exprime les doutes et les fêlures de ce professeurs d’âge mur. Maxime-Lior Windisch est une Rita décalée à souhait et drôle, elle est dynamique, tenace, courageuse et touchante lorsqu’elle évoque sa vie maritale et familiale. Elle maîtrise parfaitement l’évolution de son personnage. Leur interprétation est remarquablement complémentaire.
Le décor composé d’une grande bibliothèque bien remplie, d’un bureau et d’une table rappelle le rôle important que joue la littérature dans l’évolution de Rita.
L’histoire de Rita offre aussi la possibilité à l’auteur de soulever la question de l’importance de la culture dans l’épanouissement personnel et social. Franck mentionne aussi les risques de formatage de la pensée dans les exercices universitaires.
Cette pièce de Willy Russell nous fait penser à My fair Lady, le film musical de Gorge Cukor en 1964 inspiré de la pièce de George Bernard Shaw Pygmalion de 1914. La jeune Rita s’exprime d’une manière familière comme la jeune fleuriste cockney Eliza Doolitte mais son ambition ne se limite par à s’exprimer comme une duchesse, elle veut accéder au savoir, se cultiver. De son côté Franck n’est pas le professeur Higgins, il ne s’agit pas d’expérience mais de transmission de connaissances pour offrir à Rita la capacité de réfléchir, juger et s’exprimer avec aisance en toute liberté. Cependant , les deux personnages féminins Eliza Doolittle et Rita vont perdre de leur spontanéité, de leur authenticité.
L’éducation de Rita est une pièce d’une facture classique, drôle et sensible, interprétée par deux comédiens talentueux et énergiques, qui rappelle combien l’accès à la culture pour tous est important.
Spectacle à partir de 10 ans.
L’Éducation de Rita, texte de Willy Russell traduit par Catherine Marcangeli
Mise en scène Owen Doyle, assisté par Katie Haigh Mayet.
Avec Owen Doyle et Maxime-Lior Windisch.
Scénographie et costumes de Anaïs Alric.
Création lumières de Antoine Mucciante.
Son et musique de Tom McEvo.
Festival off Avignon jusqu’au 26 juillet.
Théâtre de l’Adresse, 2 Av. de la Trillade, 84000 Avignon
11h45 – Durée : 1h30
