Jean-Loup Rivière
Mort d’un grand analyste du théâtre
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- 27 novembre 2018
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“La” mort, à 70 ans, de Jean-Louip Rivière, a frappé de stupeur le monde universitaire et le monde du théâtre. Il était encore ces derniers temps d’une grande activité, participant à des jurys, commissions, publications, quand un cancer fulgurant a eu raison de lui. On ne compte pas les responsabilités qu’il a eues après une enfance à Caen et des études sous la direction de Roland Barthes : producteur à France-Culture, chargé d’études au Centre Pompidou, critique dramatique à Libération, secrétaire général de la Comédie-Française (où il a dirigé les Cahiers de la Comédie-Française), professeur à l’Ecole normale supérieure de Lyon et au Conservatoire, directeur de la collection « Le Spectateur français » à l’Imprimerie nationale…
Il écrivait aussi du théâtre. Ses pièces, Jours plissés et La Pièce du scirocco, ont été peu jouées mais sont éditées aux Impressions nouvelles. Il a publié aussi un grand nombre de traductions (italien, hongrois). C’est surtout comme essayiste qu’il a marqué son temps. Ami de Jacques Lassalle, il a publié de remarquables Conversations sur Don Juan et un certain nombre de livres qui, avec passion, proposaient des lumières nouvelles sur le mystère que représente une création théâtrale : Comment est la nuit ? Essai sur l’amour du théâtre, L’Arche, 2002 ; Le Monde en détails, 2015.
Personnage d’un abord doux mais réservé, sévère dans son enseignement, il plaçait toujours la barre très haut, comme on peut le percevoir à chaque ligne de Comment est la nuit ? : « Le théâtre est sans doute la pratique humaine la plus ingénieuse qui présente une alternative à l’asile et à l’Eglise. Au théâtre s’assemblent des croyants à qui il ne sera pas demandé compte de leur croyance, ou, plus précisément, le théâtre s’adresse aux croyances de chacun en délivrant chacun de sa religion. Contre la folie, il socialise les chimères. Contre la religion, il libère au baisser du rideau la communauté d’un soir. Entre la solitude radicale et l’agglutination doctrinale, il maintient cette position fragile et paradoxale d’une communauté déliée. Il donne l’idée d’une liberté sans sauvagerie, d’une société sans dogmes militants… »
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