Le Guide du stand-up et du one man show… d’Etienne de Balasy
Le Balasy, un livre pour rire encore plus haut
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- 15 mars 2021
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Lorsqu’ils parlent d’une loupe, les anglophones ne disent pas verre grossissant, mais verre magnifiant. Grâce à un petit livre modeste et pénétrant, on peut le dire aussi des stars du « seul en scène », cet art scénique dont la triomphale expansion est peut-être la grande nouveauté théâtrale du 21ème siècle.
Auteur, metteur en scène, acteur, prof chez Florent, Etienne de Balasy, qui fut aussi directeur artistique du Montreux comedy festival, a publié au Cherche-Midi un « Guide (presque) complet du ( presque ) parfait stand-up et one-man show ». Il aurait pu le titrer aussi « Comment ne pas se louper quand on se met sous la loupe », car il y démontre au passage (et sans jamais « la ramener »), que les pratiquants de son art, quand ils atteignent à leur meilleur, ne sont rien d’autre que des lunettes grossissantes d’eux mêmes, et que montrer leur singularité (fût-ce pour se moquer littéralement du monde) a l’effet d’enrichir, de magnifier la nature humaine toute entière.
Grâce à deux chapitres consacrés à l’art de l’écriture, coincés presque secrètement entre une sélection de bonnes adresses et de sages conseils de stratégie, le Balasy mérite rien moins qu’une place dans les bibliothèques de théâtre, auprès des traités de Copeau, Dullin, Jouvet, Vilar, Vitez (et même bien avant ces deux derniers, du moins par ordre alphabétique, diraient les champions de sa discipline). L’artiste de stand-up, en effet, présente cette particularité, d’être sans échappatoire le sujet de lui-même, l’instrument obligé de sa propre musique. Et la difficulté du théâtre d’humour, cet art à la cruauté sèche dont la sanction est immédiate : pas de rire, pas d’avenir, l’oblige à être doublement virtuose, comme interprète et comme luthier, en même temps Paganini et Stradivarius.
Or, Balasy ajoute à ces deux exigences une troisième, qu’on pourrait appeler l’exigence de sincérité. Ou, si on écoute bien ce qu’il nous dit entre les lignes, l’exigence de poésie. Pour émouvoir, on le sait, il ne faut pas mentir. Pour faire rire non plus, car le rire est aussi une belle émotion. A ses yeux le stand-uper idéal serait à la fois Paganini et Stradivarius, et par dessus le marché un clown, un grand reporter, sans jamais oublier d’être un Rimbaud au cœur fragile.
Au fond, Etienne de Balasy redonne tout simplement son sens premier au mot stand-up : se tenir debout. Il nous dit qu’on rit mieux quand on rit de plus haut.
Et, politesse suprême, il cache sa profondeur sous une écriture délicieusement loufoque.
Guide (presque) complet du (presque parfait) stand-up et du one man show d’Etienne de Balazy. Editions du Cherche-Midi, 17 euros.
Photo DR Balasy