Paris- Théâtre de la Bastille jusqu’au 28 novembre 2009
Sexamor de Pierre Meunier
Les objets obscurs du désir
Au cours de sa navigation sur une mer déchainée, le capitaine solitaire d’un vaisseau fantôme découvre dans les flots une femme - sirène prise au piège d’une grande cavité plastique dont il l’aide à se libérer. Ainsi s’ouvre ce spectacle écrit et interprété par Pierre Meunier et Nadège Prugnard. Il s’inscrit dans cette rencontre insolite d’un homme et d’une femme, dont l’attirance réciproque ouvre sur une déclinaison des jeux de l’amour et du sexe, à travers une succession de liaisons en mesure d’évoquer – et de questionner – les mécanismes du désir. Depuis les premiers regards échangés et les premiers frottements, un chemin tortueux semé d’incertitudes et d’embûches, d’attractions et de rejets, d’épreuves et de tensions, qui peuvent conduire à la violence lorsque la quête amoureuse et sexuelle s’accompagne d’une soif d’absolu qui renvoie à la solitude. Dans l’assemblage des objets et des machines qui meublent l’espace de représentation s’instaure un climat chaotique à même de faire écho aux agitations des sentiments et des corps. Anneaux géants, roue à aubes, outils détournés, plateau tournant constituent autant de sources d’obstacles ou de jonctions alternées, ponctuées de sons évocateurs d’un environnement maritime. Tour à tour la représentation prend des colorations changeantes, croisant le symbolisme avec la trivialité, le concret avec l’onirique – lors de l’accouplement de la belle avec l’homme devenu cerf – dans une tonalité qui allie gravité et humour. Pourtant le spectacle n’atteint sa plénitude que dans de trop rares moments. Il pèche dans sa vocation ludique et son esprit de liberté à seulement effleurer les interrogations fondamentales qu’il soulève, parfois de manière confuse ou sommaire. Nous sommes aussi assez éloignés de la joyeuse densité poético-philosophique provoquée par les précédentes créations de Pierre Meunier (Le Tas, Au milieu du désordre), grand manipulateur d’objets, trublion espiègle et inventif de la scène, qui semble toutefois mieux inspiré par “ l’érection du tas de pierre ” que par celle de l’homme.
SexAmor, projet de Pierre Meunier, fabrication collective, texte et jeu Pierre Meunier et Nadège Prugnard, son Alain Mahé, costumes Christine Thépenier, peinture Catherine Rankl, Eric Gazille. Durée 1 h 30 . Théâtre de la Bastille jusqu’au 28 novembre 2009. Théâtre Dijon – Bourgogne du 19 au 21janvier 2010, Centre Culturel A. Malraux – Vandoeuvre du 26 au 30 janvier 2010, Théâtre national de Strasbourg du 2 au 10 février 2010.
© Mario del Curto