Avignon Off, Théâtre du rempart
Mystère Pessoa Mort d’un hétéronyme de Stanislas Grassian
Un auteur et ses doubles
Pessoa se multiplia en des doubles qu’il appela « hétéronymes » au point de signer certains de ses livres du nom de ses autres lui-même : Ricardo Reis, Alvaros de Campos, Alberto Caeiro. L’acteur-metteur en scène Stanislas Grassian les réunit et les mêle tous : ces doubles et Pessoa lui-même, plus la femme dont il est éprise, Ophelia. Et tourne le manège, délirant et angoissant manège où les pensées les plus philosophiques bondissent parmi des dialogues de sourds avec l’humanité « normale » et heurtent les poèmes d’un rêveur à l’imagination sans limites, où la vie tranche dans le vif de la pensée (Ophelia s’en va, ne comprenant rien à cet homme qu’elle aime et qui l’aime).
La scène est entre le surréalisme et l’absurde : un lit, une armoire où les personnages apparaissent dans les ouvertures, un coffre – le fameux coffre où furent retrouvées les principales œuvres de Pessoa, manuscrites, inconnues, inédites, après sa mort. Stanislas Grassian compose un Fernando hagard et malheureux dans son costume noir et sous son melon du même ton de deuil. Les autres acteurs sont des doubles contrastés, tous différents, pris dans une ronde infernale, cruelle, désespérée, où la violence surgit au milieu de la songerie. L’un des plus beaux « tableaux » scéniques consacrés à l’auteur du Livre de l’intranquillité.
Mystère Pessoa Mort d’un hétéronyme, d’après l’œuvre de Fernando Pessoa, adaptation et mise en scène de Stanislas Grassian, une création du collectif Hic et Nunc, scénographie de Géraldine Mandet, musique de Benjamin Segal et Vincent Lepoivre, lumières de Frédéric Coustillas et Nicolas Gros, avec Rapahël Almosni, Jacques Courtès, Florent Dorin, Nitya Fierens, Stanislas Grassian. Théâtre du Rempart, Avignon, 15 h 40, tél. : 09 81 00 37 48 et 04 90 85 37 48. Durée : 1 h.
