Paris, Vingtième théâtre jusqu’au 3 juin 2012

Haïm, à la lumière d’un violon de Gérald Garutti

L’art contre la barbarie

Haïm, à la lumière d'un violon de Gérald Garutti

Dès sa plus tendre enfance Haïm Lipsky rêvait de musique et quand il marchait dans les rues de sa ville natale de Lodz en Pologne dans les années 1930, c’était tout un orchestre qui l’accompagnait dans sa tête. Gamin, il s’est offert son premier violon avec ses sous, un crincrin que le cordonnier de l’étage au-dessus réparera. Il ose se présenter chez un grand musicien voisin qui lui apprend le solfège et lui fait découvrir le répertoire classique. C’est d’une certaine manière la musique qui lui a sauvé la vie. Après avoir connu l’horreur du ghetto de Lodz, le voilà à 20 ans jeté à Auschwitz. Appartenir à l’orchestre du camp était une chance de ne pas mourir de faim mais qu’il fallait payer cher tant le travail était harassant et moralement épuisant. Il y retrouvera les musiciens Klezmer qui jouaient dans les rues de Lodz. Haïm a tenu bon et quand à la Libération les Allemands ont évacué les prisonniers, il s’est enfui et s’est réfugié dans une maison où il a pu se cacher. En arrivant il a tout de suite vu le violon accroché au mur. Maria, la femme qui l’a accueilli et qui prend soin de lui, lui offrira le violon avec lequel, des années plus tard, Haïm enseignera le violon à ses enfants et à ses petits-enfants en Israël. A son arrivée en 1948, il avait un violon dans une main et on lui a mis un fusil dans l’autre. Aujourd’hui, Haïm, qui aujourd’hui parle hébreu, a 90 ans. Ses enfants sont musiciens (Shifra Sluchin et Arié Lipsky) et son petit-fils Naaman Sluchin, violoniste, participe à cet hommage émouvant à son grand-père venu d’Israël pour l’occasion.

Gérald Garutti qui a monté le projet, a écrit le récit de la vie de Haïm et a demandé à Anouk Grinberg, une comédienne trop rare, d’en être la récitante. Elle raconte l’histoire de Haïm de cette voix singulière qui fait entendre comme une vibration des cordes vocales en écho aux cordes du violon. En équilibre sur le fil coupant de la sensibilité, elle émeut par sa présence lumineuse, par ses sourires voilés de tristesse, expression proche de la "gaîté de résignation" dont parle Albert Cohen à propos de ceux qui ont connu trop de malheurs. Dommage que le texte ne soit pas plus littéraire justement, à la mesure de quelques bonheurs d’écriture comme celui-là : « A sa sortie d’Auschwitz, Haïm a rejeté le polonais pour ne parler que deux langues, le yiddish et le silence. ». Mais la musique pallie ce qu’il manque au style. En effet, Anouk Grinberg dialogue avec des musiciens d’exception qui mélangent les genres, du classique au klezmer. La comédienne est entourée de l’accordéonniste Alexis Kune, du clarinettiste Samuel Maquin du brillant violoniste (et petit-fils de Haïm) Naaman Sluchin et de l’exceptionnelle pianiste Dana Ciocarlie, d’une virtuosité et d’une sensibilité incomparable. Ce spectacle intime est le résultat d’une belle aventure humaine et artistique, un hommage émouvant à un homme d’exception.

Haïm, à la lumière d’un violon, écrit et mis en scène par Gérald Garutti ; costumes, Thibaul Welchin ; avec Anouk Grinberg (récitante et collaboration artistique), Naaman Sluchin (violon), Dana Ciocarlie (piano), Alexis Kune (accordéon), Samuel Maquin (clarinette). Au vingtième théâtre jusqu’au 3 juin 2012. Samedi à 15h les 3 mars, 31 mars, 7 avril, 14 avril et 21 avril. Dimanche à 20h30 : tous les dimanches sauf les 11 mars, 22 avril et 6 mai. En semaine à 21h30 les 2, 3, 4 mai. Durée : 1h30. Res : 01 43 66 01 13.

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

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1 Message

  • Haïm, à la lumière d’un violon de Gérald Garutti 4 décembre 2012 12:29, par Gournay

    Bonjour à tous !

    Je me permets de vous annoncer la reprise de ce merveilleux spectacle les 20,21 et 22 décembre à la salle Gaveau (Paris 8ème).
    Après son succès au vingtième théâtre l’an passé, Haïm à la lumière d’un violon, magnifique message d’espoir, revient avec une toute nouvelle énergie apportée par Natacha Régnier.

    Venez nombreux pour faire vivre le message que porte Haïm et partager avec nous un moment théâtral, musical et poétique !

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