Du 28 février au 11 mars 2024 au TGP - CDN de Saint-Denis.

Néandertal de David Geselson.

Une plongée dans l’Histoire des origines qui bouscule les préjugés ethniques.

Néandertal de David Geselson.

David Geselson, auteur et metteur en scène à la fois inspiré et avisé, crée un magnifique Néandertal, pièce autour de la génétique, à partir du récit autobiographique du chercheur suédois Svante Pääbo, Néandertal, à la recherche des génomes perdus.

Un presque roman policier où le biologiste raconte les trente-cinq ans de recherches qui l’ont mené à la découverte du génome complet de l’homme de Neandertal, expliquant aussi comment la comparaison de notre ADN avec le sien prouve que Sapiens et Néandertaliens se sont mélangés - finie, toute "pureté" prétendue, il y a 42 000 ans. Une partie survivante des gènes du Néandertal est en nous. Une histoire de quête originelle aussi, via le père du paléo-généticien suédois, Prix Nobel de physiologie et de médecine, qui l’a abandonné.

Néandertal est une pièce librement inspirée du livre, et la fiction scénique, ceci est sa force même- inventivité joueuse, imaginaire luxuriant et rêve entrevu - que sait concocter avec soin et brio le concepteur, qui met en scène la vie à la fois intime et professionnelle de cinq chercheuses et chercheurs, et d’un père qui tente de se réconcilier avec son fils. : de quoi ne pas s’ennuyer.

Luca et Rosa - David Geselson, bien décidé, et Laure Mathis, radieuse -, un couple de scientifiques vivant en Californie, font la rencontre de Lüdo - attachant Elios Noël -, un chercheur passionné par les origines de l’Homme. Naît alors un trio amoureux caché entre recherches et sentiments.

Adèle - vibrante Adeline Guillot, -, paléo-généticienne, atteinte d’une maladie dégénérative de la mémoire, est éprise de Mila - facétieuse Marina Keltchewsky -, gardienne des plus vieux os néandertaliens à Zagreb en Croatie, alors que l’énigmatique Jan, le père de Lüdo, tente de renouer avec ce fils né d’un adultère qu’il n’a pas reconnu à la naissance.

Amours, ruptures, filiations, espoirs déçus, échanges entre laboratoires de San Francisco, de Münich et de Zagreb : se dégage la façon dont l’intimité influe sur les recherches, de même les découvertes sur la vie privée. Et rendre accessible l’histoire scientifique à tous, en la démystifiant, quand s’interposent de plus, des conflits géo-politiques et historiques, des enjeux écologiques.

Et retourner en Israël - y travailler et s’y installer ou pas, Rosa se pose la question : sur l’écran vidéo, apparaissent Bill Cinton, Yasser Arafat, et Itzhak Rabin, ancien premier ministre d’Israël, assassiné à Tel-Aviv en 1995 par Yigal Amir, un jeune extrémiste israélien âgé de 25 ans, après avoir été un des instigateurs du processus de paix entre Israël et l’OLP. Echec hélas durable. Et l’actualité des derniers mois dans cette partie du monde ajoute à la catastrophe - chaos et terreur.

Après Néandertal et Homo Sapiens, retour dans un passé récent fait de tensions et d’émotions face à une violence endémique. En se retournant sur le passé, ainsi que le peint la fameuse aquarelle de l’Angelus Novus de Paul Klee, contemplée par Walter Benjamin, l’avenir peut être appréhendé.

Salle blanche de laboratoire, qui reculée dans le lointain s’avance aussi sur le devant de scène, avec à l’intérieur ses chercheurs en combinaison stérile, occupés par des opérations à vue de dessins pré-historiques et de séquençage hic et nunc du génome néandertalien souhaité.

Pour Zagreb encore, de la terre est accumulée sur le plateau contenant des ossements anciens - allusion est faite en même temps aux massacres et aux charniers de Srebrenica et d’ailleurs.
La représentation n’en reste pas moins festive et tonique, au-delà des tragédies de l’Histoire surgies çà et là dans l’émotion, la colère et l’impuissance.

Les interprètes font vibrer avec talent leur personnage, entre empathie, écoute et attention au monde alentour. L’existence avec ses manques, ses ratés et ses carences, re-sort grandie des questions posées. Adèle dit à sa fille de ne jamais cesser de découvrir, d’explorer la vie, d’exercer sa curiosité et de rencontrer l’Autre.

Voyage scénique actif donnant à rêver et à ressentir, belle adresse à un public mobilisé et charmé.

Néandertal, texte et mise en scène David Geselson, scénographie Lisa Navarro, lumière Jérôme Papin, vidéo Jérémie Scheidler, son Loïc Le Roux, musique Jérémie Arcache, costumes Benjamin Moreau. Avec David Geselson, Adeline Guillot, Marina Keltchewsky, Laure Mathis, Elios Noël, Jan Hammenecker en alternance avec Peter de Graef et Marine Dillard, dessin au plateau, Jérémie Arcache, en alternance avec Valentin Mussou violoncelle, scénographie Lisa Navarro et Margaux Nessi, lumière Jérémie Papin et Rosemonde Arrambourg, vidéo Jérémie Scheidler musique originale Jérémie Arcache, costumes Benjamin Moreau et Florence Demingeon, regard extérieur Juliette Navis. Du 28 février au 11 mars 2024, du lundi au vendredi 19h30, samedi 17h, dimanche 15h, relâches les 5 et 9 mars, Théâtre Gérard Philipe, CDN. Du 15 au 17 mars, Théâtre Sénart, scène nationale (Lieusaint). Le 21 mars, Le Gallia Théâtre, Scène conventionnée, Saintes. Le 4 avril, Théâtre de Choisy-le-Roi, scène conventionnée. Du 10 au 12 avril, La Comédie, CDN Reims. Du 22 au 26 mai, Comédie de Genève. Le 30 mai, Théâtre de Lorient, CDN.


Crédit photo : Simon Gosselin.

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Véronique Hotte

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