La mort de Guy Bedos
Un clown politique
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- 29 mai 2020
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Guy Bedos est mort le 28 mai, âgé de 85 ans. On n’a pas à présenter le grand humoriste qu’il fut, commençant d’abord par les sketches qu’il jouait avec Sophie Daumier puis tout seul, devenant un polémiste de gauche et inventant le principe de la « revue de presse », à partir de laquelle il commentait les événements et distribuait ses flèches (et, plus rarement, ses bons points) aux hommes politiques. Il en faisait trop, sans doute, dans ce rôle de redresseur de torts, et sa façon de se présenter comme la bonne conscience de l’époque était souvent irritante. Il disait pourtant avec justesse : « Les gens ont des vies si tristes et si humiliantes dans leurs bureaux. Ils viennent se venger de leur ennui en m’écoutant. » Lors de ses adieux, à l’Olympia, en 2012, il sut mettre de côté ses défauts et faire un show aussi drôle qu’émouvant, parlant en cours de soirée de son fils Nicolas avec qui la relation était autant d’affection que de rivalité. Il écrivait lui-même une partie de ses textes (il publia même un certain nombre de livres) mais beaucoup de ses sketches étaient de Jean-Loup Dabadie qui vient de s’en aller juste avant lui : c’est une génération qui nous quitte…
Il participa à de nombreuses créations théâtrales, tout en ayant le goût des classiques puisqu’il intégra du Molière dans son spectacle à deux, Bedos/Robin, à l’Olympia, en 1992. Après avoir joué par mal de comédies, il resta dix ans sans faire du théâtre de texte, puis revint pour ce spectacle avec Muriel Robin. Juste après, il endossa crânement le rôle principal - le double d’Hitler ! - de La Résistible Ascension d’Arturo Ui de Brecht, à Chaillot, en 1993, dans une mise en scène de Jérôme Savary. Ce ne fut pas son seul retour aux pièces à plusieurs personnages. Après Dérapage d’Arthur Miller (toujours avec Savary, 1997), il créa la première pièce de son fils Nicolas, Sortie de scène, dans une mise en scène de Daniel Benoin, en 2005 : il y campe un écrivain acariâtre qui déteste l’humanité et sort peu à peu de sa méchanceté. Il reste fidèle à l’écriture de son fils avec Le Voyage de Victor en 2009. Enfin, lui et Roger Dumas (puis Philippe Magan) incarnent des vieillards fuyant leur maison de retraite, dans Moins 2 de Samuel Benchetrit en 2015. A franchement parler, Bedos, qui se revendiquait comme un comédien formé dans les cours d’art dramatique (la rue Blanche) et sur les planches, n’était pas toujours en scène le bon acteur qu’il est au cinéma. Il ne se détachait pas assez des effets qu’il affectionnait dans ses shows (l’accent pied noir, une certaine façon de souligner le comique). Mais il avait l’évidente présence d’un personnage populaire. C’était un clown de haute volée dont on salue le départ avec révérence.
Photo Théâtres privés parisiens.