Jean-Loup Dabadie est mort

Les petits vaisseaux du coeur

Jean-Loup Dabadie est mort

L’auteur, scénariste et académicien Jean-Loup Dabadie est mort, âgé de 81 ans, le 24 mai, à Paris. Le cinéma, la chanson et les sketches sont les domaines où il obtint les plus grands succès, si l’on songe aux prestations de Michel Polnareff, Guy Bedos, Julien Clerc, Alex Lutz, et aux films de Claude Sautet notamment (la mort récente de Michel Piccoli, qui joua plusieurs scénarios de Dabadie soulevait déjà une première vague de tristesse, inscrivait l’adieu d’une génération et d’une forme d’esprit particulièrement attachantes). Mais le théâtre, c’était aussi sa vie. Il était un homme du spectacle, il vivait parmi les acteurs et allait les voir en scène. Il fit de nombreuses adaptations de l’espagnol et surtout de l’anglais, qui étaient, en fait, des écritures très personnelles, si l’on pense à ses versions de Deux sur la balançoire de William Gibson et de Quelque part dans cette vie d’Israel Horovitz, auxquelles on ajoutera sa transcription Madame Marguerite du Brésilien Roberto Athayde. Mais il avait débuté, en 1967, par une œuvre originale, La Famille écarlate, qui avait eu un grand succès, et n’avait ensuite exploité cette veine personnelle que pour D’Artagan (1988) et Je ne suis pas un homme facile (1993).
Sa plume, où l’humour et l’émotion étaient d’une même musicalité, avait, comme son cœur, toutes les délicatesses. Ecoutons-le nous parler – c’était en 1990, dans un entretien de L’Avant-Scène Théâtre autour de Quelque part dans cette vie : « Vingt ans après mon scénario des Choses de la vie d’après Paul Guimard, je tente une nouvelle fois de décrire les moments exceptionnels d’une vie normale… Entre les scènes violentes il y a des scènes non pas banales mais de quotidienneté. Evidemment, l’ambiance serait plus bigarrée si les scènes n’étaient faites que de gestes et de mots à sensation. Mais la vie n’est pas tricotée ainsi. Les silences et la tension au moment où l’on sent l’aile de la mort qui effleure le personnage joué par Pierre Dux (NDLR : le personnage féminin était joué par Jane Birkin) n’ont de valeur que parce qu’ils sont entourés, en amont et en aval, d’une conversation sur « la vie, la mort, la coiffure »… Je crois que si nous n’avions que des instants de crise, la pièce aurait, au bout d’une heure de spectacle, brûlé tous les petits vaisseaux du cœur. Il faut accepter des moments de mer étale pour que la tempête n’en soit que plus grave, plus belle ».
« Les petits vaisseaux du cœur » : tout Abadie est dans cette image.

Photo R. Picard / Antenne 2  : première cérémonie des Molières, 1987 : Sonia Vollereaux, Jean-Pierre Aumont et Jean-Loup Dabadie.

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

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