Brandon de Kerbusch et Petrone

Chronique sociale entre révolte et exploitation

Brandon de Kerbusch et Petrone

Brandon espère séduire par son apparence. Par manque d’argent, il lui est difficile de parader comme il l’espérerait. Le voilà, comme son frère, réduit à être éboueur tandis que son père est licencié par son usine.

La pièce de Guillaume Kerbusch et Laura Petrone est nerveuse, composée de séquences brèves en succession rapide. La mise en scène des auteurs fait part généreuse à l’énergie de comédiens qui ne cessent d’interpréter plusieurs rôles nécessitant des changements instantanés de personnalités et d’apparences.

La scénographie est du même acabit. Au départ d’une sorte de conteneur rouillé, on passe, par métamorphoses multiples, en divers lieux : chambre de Brandon, arrêt de bus, magasin de fringues, maison familiale, entrepôt à déchets, bureau du patron, cabine du camion-poubelle, déchetterie, discothèque, dépôt clandestin d’ordures…

L’efficacité vocale et corporelle des interprètes frise la saturation mais évite tout ennui par baisse de régime. Le ton agressif des paroles est dans la ligne du parler ado des banlieues, à la mesure des violences latentes d’une vie urbaine surcompressée et d’un système économique impitoyable envers les moins nantis, les surendettés, les abandonnés de la prospérité apparente de nos sociétés. Même si la pièce frise les stéréotypes d’une certaine caricature, elle demeure réaliste dans sa présentation des dérives actuelles.

La notoriété basée non sur l’intelligence et les compétences mais sur les apparences vestimentaires, sur la possession plutôt que sur la personnalité réelle, sur les réactions émotives à travers les réseaux sociaux plutôt que sur la réflexion, voilà qui mène Brandon et ses semblables à la surconsommation, l’endettement, l’aliénation, aux relations décevantes en amour ou en amitié.

On sort de là abasourdi mais ébranlé. Voir sur scène, en direct, une descente aux enfers dans une atmosphère de planète déboussolée impressionne davantage que bien des reportages dans les médias qui n’en sont pas avares.

Dès 12 ans
Durée : 50’
Mise en scène : Guillaume Kerbusch, Laura Petrone
Interprétation : Aurélie Alessandroni, Jérémy Grynberg, Nabil Missoumi
Scénographie : Ronald Beurms
Production : Trou de Ver
Photo : © Pierre Exsteen. Province de Liège

Le 13 et 14 janvier 2022 au Centre Culturel de Stavelot [Be]
Le 15 janvier 2022 au Théâtre des 4 mains à Bruxelles [Be]
Le 22 janvier 2022 au festival ‘Poil à gratter’ au centre André Malraux à Hazebrouck

A propos de l'auteur
Michel Voiturier
Michel Voiturier

Converti au théâtre à l’âge de 10 ans en découvrant des marionnettes patoisantes. Journaliste chroniqueur culturel (théâtre – expos – livres) au quotidien « Le Courrier de l’Escaut » (1967-2011). Critique sur le site « Rue du Théâtre »...

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