Paris, Théâtre de l’Epée de bois, jusqu’au 25 avril

Mon cœur caresse un espoir d’après Léon Werth et les archives de l’occupation

La noire France des années noires

Mon cœur caresse un espoir d'après Léon Werth et les archives de l'occupation

« Mon cœur caresse un espoir et nous partons pleins d’ivresse » disait l’un des messages de Radio-Londres pour annoncer le Débarquement. Valérie Antonijevitch s’est souvenu de cette formule codée mais est surtout partie du témoignage de Léon Werth, « Déposition – Journal de guerre 1940-1944 », et des archives de l’occupation qu’elle est allée consulter et défricher dans différents lieux de mémoire. Au final elle a conçu un spectacle qui vise à représenter la vie réelle des Français pendant les années noires de la dernière guerre. Une succession de tableaux très courts fait passer d’une famille à l’autre, d’un lieu à l’autre. Entre-temps, sur la muraille de l’Epée de bois, s’inscrivent des phrases des responsables du pouvoir, de Pétain à Goebbels, et se succèdent, en voix off, des extraits du livre de Werth. Ainsi va-t-on de discussions sur l’armistice signé par Pétain jusqu’à l’arrivée des troupes libératrices, en assistant aux vicissitudes d’une France rarement héroïque, un peu collaborationniste et le plus souvent dans la prudence du sauve-qui-peut et du chacun pour soi.
Le spectacle souffre d’abord d’une interprétation trop réaliste, qui rappelle les films en noir et blanc de la Libération, mais finit par emporter l’adhésion par sa rigueur et son honnêteté. Il donne vraiment à voir l’ambiguïté d’une population confrontée à la guerre, à la privation, à la torture et aux rumeurs. Les acteurs, qui passent d’un rôle à l’autre, le font habilement, mais avec, parfois, une diction qui pourrait être améliorée. Créée en partenariat avec la Ligue des droits de l’homme, la soirée tient ses promesses comme objet historique de grand intérêt. En tant qu’objet théâtral, bien des choses gagneraient à être affinées mais Valérie Antonijevitch est un jeune metteur en scène qui place haut la barre et compte désormais parmi les artistes de sa génération.

Mon cœur caresse un espoir d’après Léon Werth, conception, mise en scène et scénographie de Valérie Antonijevitch, chorégraphies de Yano Iatridès, lumières de Stéphane Vérité, son de Benjamin Chevillard, décors d’Eric Pirat et Jean-Pierre Vuidepot, avec Yves Buchin, Jeanne-Marie Garcia, Frédéric Jeannot, Tom Roche, Nadja Warasteh, voix d’Aristide Legrand. Théâtre de l’Epée de bois, cartoucherie de Vincennes, tél. : 01 48 08 39 74, jusqu’au 25 avril (1h50).

Photographie : Joey

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

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