Nice - Théâtre national de Nice jusqu’au 31 janvier 2010

Le Collectionneur de Christine et Olivier Orban

Le trésor égaré

 Le Collectionneur de Christine et Olivier Orban

Au départ, un roman de Christine Orban. A l’arrivée, une pièce de Christine et Olivier Orban. Ç’aurait pu être un film (des réalisateurs se sont intéressés au livre). Mais le théâtre, avec son huis clos, sa manière d’éliminer l’accessoire au profit de l’essentiel, convenait sans doute mieux à cette histoire tout à fait ingénieuse. Un numismate marié ne vit que pour sa collection de pièces de monnaie ; son épouse compte moins que ses numéraires anciens. Presque par hasard, il acquiert le trésor suprême, puisqu’on pensait cette monnaie totalement détruite : une pièce en or à l’effigie de Cléopâtre, conçue par elle-même et tirée à quelques exemplaires pour ses amis (et amants) réunis le soir de son anniversaire. Il invite le plus grand collectionneur italien à la découvrir. Au moment où la pièce sort de sa boîte, une coupure de courant plonge le salon dans l’obscurité ; quand la lumière revient, la pièce a disparu. Le visiteur italien l’a-t-il volé ? Au terme d’un rebondissement digne de Gaston Leroux, le numismate devra reconnaître qu’il a soupçonné et persécuté à tort l’Italien. Un vol n’est pas l’explication de cette disparition. La vérité et la révélation finale empruntent d’autres chemins.
La soirée est fichtrement romanesque, comme le théâtre d’aujourd’hui ne l’est plus. Cela fait du bien ! Et c’est un romanesque à deux étages. Sous le vertige de l’intrigue il y a le vertige de l’être humain, fou de ses possessions puis taraudé par la vengeance et le sentiment de la faute. Daniel Benoin l’a bien compris, en faisant l’une de ses mises en scène les plus concises et compactes. Au lieu de respecter les changements de lieu, il a placé l’action dans un espace unique, qui est à la fois un lieu mental et le repaire obsessionnel du collectionneur. Un monde bleu nuit où se superposent des centaines de tiroirs pleins de monnaies rares le plus souvent invisibles et qui se reflète dans les costumes bleu et gris de Nathalie Bérard-Benoin. Le combat intérieur du protagoniste se déploiera parmi ces tiroirs ouverts et fermés qu’il ira jusqu’à escalader ! Le jeu très compact de Paul Chariéras et Jean-Claude Penchenat ajoute au mystère du récit, tandis que les actrices, l’excellente Nathalie Roussel et l’émouvante Jacqueline Scalabrini, introduisent dans un savant contraste plus de vibrato.Tout cela fait déjà un spectacle plaisant et stimulant où frappe plus encore l’interprétation de François Marthouret en collectionneur égaré. Celui-ci donne peu à peu une traduction physique du désarroi, de la stupeur et de la pensée désordonnée. Marthouret fait rire, saisit et trouble par une incroyable gestuelle toute en ruptures. Pas de fausse monnaie !

Le Collectionneur de Christine et Olivier Orban, mise en scène et lumières de Daniel Benoin, décor de Jean-Pierre Laporte et Daniel Benoin, costumes de Nathalie Bérard-Benoin, vidéo de Paulo Correia, avec François Marthouret, Nathalie Roussel, Jacqueline Scalabrini, Paul Chariéras, Jean-Claude Penchenat. Théâtre national de Nice, tél. : 04 93 13 90 90, jusqu’au 31 janvier. Texte aux éditions Albin Michel. (1 h 30).

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

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