Chronique

"Avec le couteau le pain " de Carole Thibaut et " Trafiquée" de Emma Hache Editions Lansman

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"Avec le couteau le pain " de Carole Thibaut et " Trafiquée" de Emma Hache Editions Lansman

« Avec le couteau le pain » de Carole Thibaut » et « Trafiquée » d’Emma Haché » aux éditions Lansman.

Au début de sa carrière d’éditeur, Emile Lansman, tel un preux chevalier partait en croisade, quittant pour un moment ses nouveaux auteurs apôtres pour y porter plus loin la bonne parole théâtrale,..
Sa réputation d’éditeur étant bien établie il marque par des collections particulières son intérêt d’ordre social et démocratique. D’ailleurs n’a-t-il pas crée ce fameux concours international : « Une scène pour la démocratie ». Et puis franchissant encore quelques obstacles, notre cavalier téméraire et cascadeur se risque à descendre dans les enfers du « théâtre perdu » pour nous présenter, toutefois, en tout art et tout honneur, une sorte de « théâtre de la cruauté ». Ce qui nous amène tout naturellement à présenter deux parutions logées, un peu à la même enseigne :
Un premier ouvrage de Carole Thibaut « Avec le couteau le pain » Texte en direction des adolescents et des adultes. Cette pièce à quatre personnages est une sorte d’état des lieux d’une famille apparemment classique : La mère, le père, la fille. Mais pour faire image d’Epinal les personnages sont poussés vers la caricature ce qui offre une distanciation assez appréciable. En fait, le milieu est excessivement répressif : un père autoritaire et violent exerce sur « sa gamine » un harcèlement continu. La mère passive et soumise fuit la situation et quand elle a le courage d’assister à une scène elle donne ouvertement raison à son dénommé mari. Tout cela baigne dans un climat hyper tendu avec des dérapages appréhendés et redoutés.
Ce texte en direction des adolescents est-il à prendre comme une œuvre de formation ? Avertissements ? Prévoyance …Prévenance …Prévention…
Il est vrai que de nos jours les oreilles se sont endurcies et qu’il vaut mieux sonner trois fois pour être entendu. Cet ouvrage mérite lecture et il pourrait très bien servir de matière pour engager par le biais de la pratique et de l’écriture théâtrale une réflexion sur les différents problèmes qui s’agitent dans le même flacon : rapports parentaux déchirants, femmes battue etc. …Vite un bouchon avant que ce flacon de Pandore ne s’évapore ! Si tel était le cas, plus tard, il n’y aurait plus grain à moudre à l’intention des sociologues et anthropologues du siècle futur….

Quant au deuxième texte, « Trafiquée » de Emma Haché, Emile Lansman fait le double saut périlleux, mais son intuition de fouille-talent l’a guidé et finalement tout retombe sur ses pattes.
D’emblée cette écriture, plus précisément ce thème pourrait choquer ; les confessions d’une prostituée qui ne raconte pas seulement comment elle ramasse les petites fleurs dans la forêt. Mais si on se penche sérieusement sur cette écriture on remarque que rien n’est crûment dit, pas une vulgarité, pas la moindre obscénité. L’auteur ne joue pas non plus sur la métaphore ou l’allégorie il joue sur l’imaginaire, le fantasme et surtout sur le fameux non-dit ( Tiens ! Il y a longtemps qu’on ne l’avait pas chatouillé celui-là )
Ainsi, assiste-t-on à la descente aux enfers d’une femme qui ne positionne pas son drame du côté de la fatalité mais qui le place hors culpabilité du côté du « conséquentiel ». Ainsi priorité à la responsabilité plutôt qu’à la culpabilité. Et c’est ce qui donne probablement beaucoup de respect à ce récit : cette priorité nous dégage de la voie de la sensiblerie et du plaintif. Elle fortifie le personnage. Dans ce récit l’héroïne prend distance et voit son corps de l’extérieur avec une froide objectivité. Elle semble, pour moins souffrir psychiquement et physiquement, détacher ce corps d’elle-même. Bref, la dureté du propos est quand même à ne pas mettre entre toutes les mains. Si vous nous permettez ce dernier jeu de mots en guise d’au revoir et à bientôt…

Jacky Viallon

A propos de l'auteur
Jacky Viallon
Jacky Viallon

Jacky Viallon aurait voulu être romancier à la mode, professeur de lettres ( influencé par les petites nouilles en forme de lettres qu’on lui donnait tout petit dans sa soupe et qu’il taquinait avec sa grande cuillère en argent symbole d’une grande...

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