Les 7 Jours de Simon Labrosse de Carole Fréchette

Les chômeurs célestes

Les 7 Jours de Simon Labrosse de Carole Fréchette

Avant tout, il y a Simon, chômeur parfait, démuni mais à moitié heureux, qui ne manque pas d’optimisme ni, heureusement, d’idées. Avec lui, il y a une jeune femme qui ne rêve que de bonté et d’action humanitaire et un ami étrange, un poète, auquel un coup sur la tête a a retiré le mot « positif » et tout ce qui s’y relie (il ne voit que le négatif des choses, s’en rend compte et le regrette). Ce devrait être l’arche du désespoir mais c’est, au contraire, une navigation chahutée, amoureuse, amusée au cœur du malheur de vivre ! Simon Labrosse raconte une semaine de sa vie. Il a été « cascadeur émotif », « finisseur de phrases », « flatteur d’égos »... Faut-il le croire ? Non, il invente mais il inverse la misère en compagnie des deux autres paumés qui parlent le langage de la rue, renvoient la balle et cherchent, comme Simon, la porte de sortie à l’enfer quotidien dont les oppressions débarquent à tout moment. Carole Fréchette s’empare du sujet le plus brûlant du monde moderne – le chômage – et fuit le réalisme comme le politiquement correct. Elle joue avec ce brûlot avec une grqnde tendresse et une sacrée fantaisie, détournant même la Bible, puisque le texte débute par ces mots : « Au commencement était Simon et Simon était sans emploi » et les répète au début de chaque scène.
Carole Fréchette a écrit Les 7 Jours de Simon Labrosse en toute liberté, comme si ces dialogues naissaient au fur et à mesure de sa plume. Cendre Chassanne les met en scène avec la même liberté, comme si la beauté des mots et des sentiments jaillissaient tout à coup, sans préméditation, de rencontres aveugles et éclairantes. Son décor, avec une toile peinte qui peut faire penser à Pollock et des graffiti, est d’un tumulte chaleureux. Labrosse est incarné par Laurent Lévy qui est une sorte de funambule de la pensée, aussi hagard que lumineux. Nathalie Bitan sait être entre terre et ciel. Philippe Saunier compose très bien ce que peut être un monde mental incomplet (puisque son personnage est privé du mot « positif » ! ) Appelons-les des chômeurs célestes, en hommage à Kerouac.

Les 7 Jours de Simon Labrosse de Carole Fréchette, mise en scène, scénographie (avec Jean-Baptiste et Ocar Gillet) et costumes de Cendre Chassanne, lumière de Sébastien Choriol, extrait vidéo de Fabio Scacchioli, avec Nathalie Bitan, Laurent Lévy et Philippe Saunier.

Lucernaire, 20 h, tél. : 01 45 44 57 34, jusqu’au 20 septembre. (Durée : 1 h 10).

Photo Dominique Hamot

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

Voir la fiche complète de l'auteur

Laisser un message

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

S'inscrire à notre lettre d'information
Commentaires récents
Articles récents
Facebook