Le Tartuffe nouveau de Jean-Pierre Pelaez
Les imposteurs de la société médiatique
Il y aura toujours des Tartuffe. Jean-Pierre Pelaez reprend le schéma de la pièce de Molière mais met sur la scène ceux qu’il juge les imposteurs d’aujourd’hui. Kruger, celui qui gruge toute une famille, est un homme politique avide de passer sur les médias et ne porte des sacs de riz à l’intention des pauvres que lorsqu’il est filmé par la télévision. Orgon, qui s’appelle désormais François Boyard, est diplomate. C’est donc une société folle de son image et avide de profit alors qu’elle professe les sentiments les plus humanitaires que l’auteur fustige sans avoir peur des mots et des scènes un peu crus. La pièce est délibérément contemporaine mais est néanmoins en vers, pour ne pas perdre la verve moliéresque. C’est ainsi que le personnage équivalent de Cléante (le frère d’Orgon), déclare : « Car on les voit bientôt, ces Messieurs Saint-Vincent / Ces zorros de l’humain, ces bienfaiteurs ardents / Dans tel ou tel parti, on dans un ministère / De leur grande bonté recevoir le salaire. »
Le pamphlet est un peu facile, mais le jeu de la transposition est amusant. Gérard Gélas a poussé le décalage jusqu’à habiller les personnages de costumes du XVIIe siècle, sauf Tartuffe qui porte souvent un complet blanc typique de la jet society d’à présent. Cela embrouille les cartes et rend l’aventure plus complexe. Créée l’hiver dernier, cette mise en scène s’est enrichie de l’arrivée de Jean-Marc Catella (de l’excellent duo Dau et Catella), qui a repris le rôle de Tartuffe-Krüger. On retrouve avec lui certains comédiens familiers de la troupe de Gélas, comme les remarquables Damien Rémy (étonnant Orgon) et Guillaume Lanson. Sur des vers qui ne seront pas éternels, un joyeux moment.
Le Tartuffe nouveau de Jean-Pierre Pelaez, mise en scène, scénographie et lumières de Gérard Gélas, costumes de Sandra Laguerre, avec Théodora Carla, Jean-Marc Catela, Bertrand Cauchois, Olivia Forest, Lucas Gentil, Guillaume Lanson, Marie Pagès, Damien Rémy, Sabine Sandra.
Théâtre du Chêne noir, 15 h 30, tél. : 04 90 86 74 87, jusqu’au 27 juillzt.
Photo de Manuel Pascual.