Le Misanthrope de Molière

Trop de sérieux

Le Misanthrope de Molière

Molière à la Cigale ! Surprise dans cet ancien music-hall devenu un temple du rock ! La mise en scène de Michèle André n’est pourtant pas rock. Elle va chercher ailleurs sa fantaisie, qui serait une forme d’intemporalité : devant un décor de tulle torsadé, les acteurs jouent dans des tenues qui évoquent plutôt le XXe siècle mais quelques éléments d’aujourd’hui s’y glissent. On ne sait pas très bien dans quelle époque l’on est. Mais l’on est dans un dépaysement où Alceste n’a plus de rubans verts, où personne ne porte de perruque et où les robes à crinoline font penser au romantisme. L’on n’est plus non plus tout à fait dans la comédie : les petits marquis, si agités habituellement, d’une cruauté mondaine si drôle, sont quelque peu effacés. De la même façon, l’opposition entre Alceste et Philinte (Jean-Laurent Silvi) est comme gommée, au profit d’une cordialité discrète entre les deux hommes.

Ce qui domine, c’est, bien entendu la relation entre Alceste et Célimène. Celle-ci, fort bien interprétée par Laetitia Laburthe-Tolra, n’est plus une coquette, comme on disait au XVIIe, mais une femme du monde, une élégante cultivée, à la voix posée, au maintien altier. Pourquoi pas ? En Alceste, Arnaud Denis – qui est l’un des plus grands acteurs apparus ces dernières années – creuse avec finesse la gravité du personnage et sa profondeur. Bel exercice, mais qui amplifie le sérieux de la représentation. C’est vrai que, fort souvent, on monte Le Misanthrope en drame. Le texte semble l’appeler, avec sa tristesse souterraine. Mais, précisément, il faut lutter contre cette trompeuse impression. On doit rire au Misanthrope, et c’est qu’a réussi, la saison dernière, Jean-François Sivadier dirigeant Nicolas Bouchaud. On ne rit pas assez ici, mais l’on est séduit par une qualité générale (belles interprétations également de Catherine Griffoni et Elisabeth Ventura) et un rythme qui enchaîne la pièce à feu vif.

Le Misanthrope de Molière, mise en scène de Michèle André, décor de Vincent Parot et Philippe André, costumes de Jean-Jacques Delmotte, lumières de Jean-Pierre Michel, musique originale de Maxime Richelme, avec Arnaud Denis, Laetitia Laburthe-Tolra, Sébastien Lebinz, Hervé Rey, Jules Houdart, Catherine Griffoni, Hervé Rey, Stéphane Ronchewski, Jean-Laurent Silvi, Elisabeth Ventura, Jonathan Bizet, Hugo Brunswick. La Cigale, tél. : 01 48 65 97 90, jusqu’au 19 septembre. (Durée : 1 h 50).

Photo Lot

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

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