Paris, Maison de la poésie jusqu’au 22 mai 2011

La Chute de la maison Usher d’Edgar Allan Poe

Habitat sombre et ténébreux

La Chute de la maison Usher d'Edgar Allan Poe

Datée de 1839, cette nouvelle de l’auteur américain Edgar Allan Poe (1809 -1849) compte parmi les Nouvelles histoires extraordinaires traduites et regroupées par Charles Baudelaire en 1857. Sous la forme d’un conte, elle témoigne de l’ambivalence d’une œuvre dominée par un symbolisme ouvrant sur la métaphysique et la psychologie en empruntant les voies du fantastique. Héritier d’une vaste demeure isolée au bord d’un lac brumeux, qu’il occupe avec sa sœur jumelle Madeline, souffrant de catalepsie, Roderick Usher est atteint d’une étrange maladie le portant vers la mélancolie et l’anxiété. Pour tenter de trouver remède à son état, il invite un ami de longue date, le narrateur, avec lequel il partage des moments d’intimité ponctués de chansons inventées, de dessins étranges et de lectures énigmatiques. Parmi celles–ci, la récitation d’un poème “ Le Palais hanté ” révèle à Roderick le sens troublant porté à ses yeux par la maison qu’il occupe, avec ses incidences sur la vie familiale, dont l’amour inaccessible porté à sa sœur. Plus tard, il annonce le décès mystérieux de celle-ci, et se livre à un cérémonial funèbre insolite dont l’issue relève du fantastique entre rêve et cauchemar. A travers cette histoire, qui associe le délabrement des âmes à celui de la maison, Poe révèle sous une forme poétique les sentiments de peur, de fatalité et de culpabilité, dont le poids pèse lourdement sur la vie des humains.

Une expérience scénique

Pour cette œuvre, fort peu théâtrale, Sylvain Maurice s’est livré à une libre adaptation qui associe différentes formes artistiques. Il intègre la musique composée par Alban Darche, interprétée en direct et accompagnant des textes de chansons écrites par Laure Bonnet, prolongeant ainsi à sa manière le projet d’un opéra inabouti de Claude Debussy, envisagé à partir de cette œuvre. Mais, il fait aussi la part belle aux éléments visuels, avec le décor et surtout les lumières délicates ou structurées d’Eric Soyer, la vidéo aux images troubles de Renaud Rubiano et Candice Milon ou encore les manipulations quasi magiques d’objets et de marionnette, réalisées avec virtuosité par le serviteur de la maison (Philippe Rodriguez-Jorda). Autant d’éléments qui contribuent à nourrir et instaurer un climat d’étrangeté nécessaire à la représentation, mais qui tombent parfois un peu trop dans l’exhibition d’un savoir faire (aussi brillant soit-il) au détriment de la profondeur poétique portée par le texte de Poe. Et, malgré les interprétations de la chanteuse Jeanne Added, qui campe un Roderick Usher androgyne, et la belle présence de Jean-Baptiste Verquin (le narrateur), on reste un peu sur le seuil de cette “maison“, malgré l’intelligence des moyens mis en œuvre.


La Chute de la maison Usher,
de Edgar Allan Poe, traduction Charles Baudelaire, mise en scène Sylvain Maurice, avec Jeanne Added (chant), Jean-Baptiste Verquin (jeu), Philippe Rodriguez-Jorda, (jeu et manipulation d’objets) les musiciens Alban Darche (compositeur), Nathalie Darche, Alexis Therain, Scénographie et lumière Eric Soyer, vidéo Renaud Rubiano et Candice Milon, son François Leymarie, costumes Marie La Rocca, marionnette et peinture Paulo Duarte. Durée 1h 05. Maison de la Poésie - Paris, du 27 avril au 22 mai 2011

A propos de l'auteur
Jean Chollet
Jean Chollet

Jean Chollet, diplômé en études théâtrales, journaliste et critique dramatique, il a collaboré à de nombreuses publications françaises et étrangères. Directeur de publication de la revue Actualité de la Scénographie de 1983 à 2005, il est l’auteur de...

Voir la fiche complète de l'auteur

Laisser un message

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

S'inscrire à notre lettre d'information
Commentaires récents
Articles récents
Facebook