Beethoven par l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler

Au Théâtre des Champs-Élysées, le vétéran Herbert Blomstedt nous offre, en compagnie d’une formation de jeunes instrumentistes, le Beethoven le plus galbé qui soit.

Beethoven par l'Orchestre des jeunes Gustav Mahler

Avoir l’impression de redécouvrir des partitions qu’on croit connaître par cœur est toujours une expérience délicieuse. Nous l’avons vécue au Théâtre des Champs-Élysées, grâce à un patriarche et à une jeune assemblée. Le patriarche, c’est Herbert Blomstedt, jeune chef longiligne de quatre-vingt-six ans, qui dirige avec une générosité et une légèreté du geste qui font plaisir à voir. L’assemblée, c’est l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler qui, comme toutes les formations réunissant de jeunes instrumentistes, se caractérise par sa maîtrise technique, par son bonheur de jouer et, bien qu’il ne s’agisse pas là d’un ensemble constitué sur le long terme (ou peut-être grâce à cette raison), par sa cohésion. Fondée à Vienne en 1986 par Claudio Abbado, cette formation réunit des musiciens âgés de vingt-six ans au plus et organise chaque année des auditions dans vingt-cinq pays européens.

Le résultat, on l’a dit, est enthousiasmant. L’orchestre avance comme un seul homme (quand bien même l’orchestre ne comporterait qu’un quart de garçons !), les archets se lèvent dans un seul élan, les bois sont gourmands et volubiles, la sonorité de l’ensemble à la fois ronde et claire. Blomstedt a bien sûr sa part dans ce résultat et obtient le meilleur de l’orchestre : râpeux comme il convient dans le deuxième mouvement du Quatrième Concerto de Beethoven, un mouvement qui pose des problèmes de style à bien des chefs, bondissant dans un finale abordé par les cordes avec une souplesse de chat puis joué d’une manière aérée, en laissant s’exprimer tel contrechant des violoncelles, en marquant le rythme sans que jamais la musique devienne martiale.

La question et la réponse

Le toucher délicat de Leif Ove Andsnes, son jeu dépouillé qui ne donne pas pour autant dans la froideur, rendent toute son intimité à cette partition qui est peut-être le plus déroutant des concertos de Beethoven. Y a-t-il plus étrange que ce début, confié au soliste à découvert comme si de rien n’était, ou ce mouvement lent en forme de questions pressantes et de réponses consolatrices ?

En seconde partie, la Septième Symphonie du même Beethoven (donnée avec toutes les reprises) est le morceau de bravoure annoncé, avec une fermeté dans les articulations, une clarté des plans sonores, une volonté, là aussi, d’avancer car toute partition orchestrale de Beethoven est le récit d’une conquête. On a rarement entendu de manière aussi saisissante tel crescendo se saisissant des contrebasses à la fin du premier mouvement ou telles montées d’intensité dans le finale. Bien équilibré (on est loin des symphonies de Beethoven jouées à huit ou dix contrebasses !), bien disposé (avec les violons I et les violons II à gauche et à droite du chef*), l’orchestre avait tout en main pour nous donner une leçon de relief et de nervosité maîtrisée. Et ce fut une leçon de maître.

photo : Herbert Blomstedt par Martin Lengemann

* Blomstedt s’explique de manière lumineuse sur cette disposition.

Beethoven : Concerto pour piano et orchestre n° 4, Symphonie n° 7. Leif Ove Andsnes, Orchestre des jeunes Gustav Mahler, dir. Herbert Blomstedt. Théâtre des Champs-Élysées, Paris, 19 mars 2013.

A propos de l'auteur
Christian Wasselin
Christian Wasselin

Né à Marcq-en-Barœul (ville célébrée par Aragon), Christian Wasselin se partage entre la fiction et la musicographie. On lui doit notamment plusieurs livres consacrés à Berlioz (Berlioz, les deux ailes de l’âme, Gallimard ; Berlioz ou le Voyage...

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