Beaucoup de bruit pour rien de Shakespeare

Beaux badinages avec l’amour

Beaucoup de bruit pour rien de Shakespeare

Il faut sans cesse saluer la vitalité du Studio-Théâtre d’Asnières, que dirige Hervé van der Meulen et dont Jean-Louis Martin-Barbaz reste directeur honoraire. C’est un théâtre et une école des plus fertiles. Beaucoup de jeunes comédiens s’y forment, qu’on voit ensuite s’affirmer sur d’autres scènes et sur les écrans. Les spectacles y sont d’une facture remarquable, avec un goût très clair pour la richesse du jeu et la variété des disciplines qui soumet le comédien à des exercices complexes. Ce qui frappe dans la dernière production du Studio-Théâtre, Beaucoup de bruit pour rien, et dans la mise en scène d’Hervé van der Meulen, c’est la diversité des atmosphères. Régulièrement, l’image, le climat, le dispositif, la relation entre les personnages se renouvellent. Van der Meulen a transposé la comédie de Shakespeare dans l’entre-deux-guerres, sans doute en Angleterre, à moins que ce soit aux Etats-Unis (mais l’action se passe en Italie, et, pour ajouter au disparate, l’un des officiers de police a l’accent suisse !), car l’on est dans un monde de fantaisie, où l’on danse le charleston, on l’on parle français et où l’on chante en anglais. La scénographe Claire Belloc s’est, elle, inspirée du cinéma Louxor à Paris et a conçu un décor étonnamment mobile avec des colonnes néo-byzantines ! A partir de tous ces éléments, le spectacle va se métamorphosant – passant de la gaîté mondaine à l’austérité d’une église -, sans que l’intensité des scènes ne soit sacrifiée.
Etrange, cette comédie qui s’interroge sur la réalité de l’amour et bouscule sans cesse les vérités des personnages et de l’histoire. Que de badinages dangereux, qui font tomber les masques ! Voilà du feuilleton, du romanesque, où s’insinue aussi la raillerie du pouvoir, à l‘échelon du prince comme à celui du fonctionnaire. Jean-Marc Coudert, Laurent Prache, Augustin Passard, Myriam Doumenq, Maylis de Poncins, Augustin Passard, Jean-Michel Meunier et Hervé van Der Meulen sont quelques-uns des interprètes, tous excellents, de cette représentation moqueuse de l’aristocratie et de la soldatesque. La traduction par Gil Delannoi est exceptionnelle : une révélation. Voilà une fête, où Hervé van der Meulen et son équipe ont su jongler sans cesse avec la nature double de tout sentiment et de tout discours. D’ailleurs, on y joue aux cartes. L’atout cœur est gagnant, mais de justesse !

Beaucoup de bruit pour rien de William Shakespeare, nouvelle traduction Gil Delannoi, mise en scène Hervé Van der Meulen, assistante à la mise en scène Elisa Habibi, 
décors de Claire Belloc, costumes d’Isabelle Pasquier,
chorégraphies de Jean-Marc Hoolbecq, chansons de Jean-Pierre Gesbert, lumières de Stéphane Deschamps, maquillage d’Audrey Million, avec Etienne Bianco, Jean-Marc Coudert, Paul Delbreil, Maylis de Poncins, Charlotte Desserre, Timothée Doucet (en alternance), Myriam Doumenq, Noé Favre, Robin Goupil (en alternance), Nicolas Guillemot (en alternance), Guillaume Jacquemont, Charles Leplomb (en alternance), Jean-Michel Meunier, Augustin Passard, Laurent Prache, Eric Pucheu, Luc Rodier, Laurène Thomas et Hervé Van der Meulen.

Studio-Théâtre d’Asnières, tél. : 01 47 90 95 33, jusqu’au 29 novembre. Traduction de Gil Delannoi aux éditions Berg international. (Durée : 2 h 20).

Photo DR.

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

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