Adieu Georges Prêtre

Le chef d’orchestre nous a quittés le 4 janvier après un carrière de plus de soixante années.

Adieu Georges Prêtre

IL Y A UN AN MOURAIT Pierre Boulez. Douze mois moins un jour plus tard, c’est Georges Prêtre qui s’efface. Difficile toutefois de trouver chefs plus dissemblables que l’un et l’autre, sachant que le premier était aussi compositeur et que le répertoire du second s’arrêtait à Messiaen : « Je crains de mal diriger ceux qui sont venus après lui », expliquait Prêtre avec un sens aigu de la litote.

Georges Prêtre était un enfant du Nord. Né à Waziers le 14 août 1924, il avait d’abord étudié la trompette au Conservatoire de Douai avant d’intégrer celui de Paris où il travailla notamment l’harmonie en compagnie du compositeur Maurice Duruflé.

Après avoir fait ses classes à l’Opéra de Marseille, au Capitole de Toulouse et à l’Opéra Comique, Georges Prêtre a mené une belle carrière internationale mais ne fait pas partie de ces personnalités qui ont bouleversé l’histoire de l’interprétation par des recherches musicologiques poussées ou un répertoire audacieux. Son amitié avec Francis Poulenc (« J’ai trouvé mon chef », disait le compositeur), dont il a abondamment dirigé et enregistré la musique, en a fait l’interprète idéal d’œuvres comme le Gloria ou La Voix humaine (qu’il a créée en 1959 avec la soprano Denise Duval), mais on sait moins qu’il était également au pupitre à l’occasion de la création de L’Opéra d’Aran de Gilbert Bécaud en 1962 au Théâtre des Champs-Élysées.

De Carmen à Mahler

Passionné d’opéra, Georges Prêtre fut invité par Karajan, alors directeur de l’Opéra de Vienne, à y diriger Capriccio. Choix étonnant qui montre la confiance que lui témoignaient les musiciens allemands. Il fut aussi le partenaire de Maria Callas et se trouva dans la fosse du Palais Garnier au moment des ultimes représentations de Norma et de Tosca données par la chanteuse en 1964 et 1965. C’est d’ailleurs avec Maria Callas, à la même époque, qu’il enregistra Carmen.

Familier des grandes scènes internationales, notamment de la Scala de Milan, Georges Prêtre dirigea également un grand nombre de concerts et fut invité à deux reprises, en 2008 et en 2010, à l’occasion du concert du Nouvel an donné par l’Orchestre philharmonique de Vienne. Il faisait partie des chefs français le plus souvent conviés à diriger Bruckner et Mahler dans les pays germaniques. Prêtre se disait d’ailleurs volontiers viennois d’adoption, les orchestres français l’ayant tour à tour adoré et boudé au fil de sa carrière.

Georges Prêtre était ce qu’on appelle un chef instinctif (doublé d’un chef sportif, répétant souvent avec une serviette sur les épaules !), capable d’entraîner des musiciens mais muni d’une conception très personnelle du tempo. Ses détracteurs dénoncent sa propension au rubato, lui-même préférait parler de souplesse ou de liberté. Il suffit d’écouter la fin de la troisième partie de son enregistrement de La Damnation de Faust (avec Nicolaï Gedda, Janet Baker et Gabriel Bacquier) pour se convaincre de la manière dont Prêtre se laissait parfois aller à des emportements.

photographie : Georges Prêtre au Musikverein de Vienne lors du concert du Nouvel an 2010

A propos de l'auteur
Christian Wasselin
Christian Wasselin

Né à Marcq-en-Barœul (ville célébrée par Aragon), Christian Wasselin se partage entre la fiction et la musicographie. On lui doit notamment plusieurs livres consacrés à Berlioz (Berlioz, les deux ailes de l’âme, Gallimard ; Berlioz ou le Voyage...

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