Opéra national de Lyon jusqu’au 1 mai 2011

Luisa Miller de Giuseppe Verdi

De la campagne autrichienne à la ville italienne

Luisa Miller de Giuseppe Verdi

Luisa Miller drame social du XVIIIème siècle, est un opéra de Giuseppe Verdi peu représenté. Il est donc difficile de parler de la production de l’Opéra national de Lyon, signée par David Allen sans penser à celle vue et revue par Caroline Alexander (voir des 28 février 2008 et 10 mars 2010) à l’Opéra Bastille dans la mise en scène de Gilbert Deflo, et ce d’autant plus que les contrastes entre les deux productions sont saisissants.

Du romantisme allemand de la campagne (autrichiènne ?) à celui de la ville (italienne ?) : le paysage champêtre, à Paris, est devenu citadin à Lyon ; là où Gilbert Deflo fait évoluer ses personnages dans un cadre ouvert et multicolore, David Allen les plonge dans un monde fermé et lugubre – le ciel qui apparaît de temps en temps au fond du décor de Gideon Davey est gris, nuageux, inquiétant- ; les chœurs de la première production qui évoluaient à leur aise, tantôt habillés en fermiers, tantôt en courtisans, ont été transformés en de simples citoyens - élégamment vêtus par Gideon Davey-, et contraints d’exécuter des chorégraphies, certes spectaculaires –bravo Maxine Braham !- mais aussi réductrices...

Un symbolisme choisi

La liste n’est pas exhaustive. Globalement, la vision naturaliste - carte postale- voulue par Gilbert Deflo a été revisitée par le regard symboliste de David Allen. Témoins supplémentaires de ce symbolisme choisi, la caractérisation de deux personnages majeurs : le méchant Wurm a pris les traits du maléfique Dr. Caligari - protagoniste du célèbre film de Robert Wiene (1920) -, alors que Miller, le paysan, père de Luisa, est devenu un luthier, reflet de la droiture de son caractère, de sa bonhomie et de son savoir-faire au service de la communauté.

Une cohérence payante. Malgré les options en tout opposées des deux « maestri » de la scène, la pièce Kabale und Liebe de Frederich von Schiller – réduite par Salvatore Cammarano et dramatisée par la musique de Giuseppe Verdi - a gardé un égal pouvoir d’émotion dans les deux cas : chacune de ces options a maintenu sa cohérence propre du début à la fin grâce au savoir-faire de l’équipe de direction de scène, auxs apports de l’orchestre, du chœur et des solistes.

Kazushi Ono – chef permanent de l’Opéra national de Lyon - a été juste et remarquable, proche des artistes sur scène, et les interventions du chœur de la maison dirigé par Alan Woodbridge dignes et mémorables.

De belles voix dans la nuit lyonnaise

La voix d’Ermonela Jaho – Luisa- élégante, flexible et juste mais, ni très affirmée ni d’une grande ampleur a brillé dans la nuit lyonnaise du 19 avril. Paradoxalement ces inconvénients apparents sont venus renforcer le caractère fragile de sa condition modeste face aux grands de ce monde, le comte Walter, la Duchesse Federica, ainsi que la soumission à l’autorité de son père, et même la timidité naturelle de la jeune fille face à son amoureux Rodolfo interprété par Adam Diegel. Le ténor a entamé son rôle avec courage et une grande énergie ; sa passion pour la jeune Luisa a masqué son émission métallique tout comme, ici et là, quelques manquements de justesse. Il a même frôlé la catastrophe vers la fin du premier acte lors d’une série d’aigus dans le « fortissimo » mais il s’est rattrapé plus qu’honorablement par la suite, car loin de se réfugier dans une interprétation conservatrice il s’est jusqu’au bout montré vocalement vaillant . Sebastian Catana a interprété Miller d’une voix sobre et un timbre viril, avec un excellent phrasé, très à l’aise dans la tessiture du père artisan.

Si les prestations de Riccardo Zanellato – Walter -, Alexey Tikhomirov –Wurm - et Mariana Carnovali – Federica - ont été de bon aloi, elles n’ont pas cependant présenté de caractéristiques particulièrement exceptionnelles.

Luisa Milleropéra en trois actes de Giuseppe Verdi, livret de Salvatore Cammarano, d’après Kabale und Liebe- Intrigue et amour de Frederich von Schiller. Mise en scène de David Allen. Direction musicale de Kazushi Ono. Avec : Riccardo Zanellato, Adam Diegel, Mariana Carnovali, Alexey Tikhomirov, Sebastian Catana, Ermonela Jaho, Pascale Obrecht, Brian Bruce .

Opéra national de Lyon les 19, 21 , 23, 25, 27, 29 avril et 1 mai 2011.

0 826 305 325 http://www.opera-lyon.com

Crédit Photos : Jean-Louis Fernandez

A propos de l'auteur
Jaime Estapà i Argemí
Jaime Estapà i Argemí

Je suis venu en France en 1966 diplômé de l’Ecole d’Ingénieurs Industriels de Barcelone pour travailler à la recherche opérationnelle au CERA (Centre d’études et recherches en automatismes) à Villacoublay puis chez Thomson Automatismes à Chatou. En même...

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