Paris, Bouffes du nord jusqu’au 5 mai 2012

The Suit (Le Costume) d’après Can Themba

Chef-d’œuvre

 The Suit (Le Costume) d'après Can Themba

L’action se passe en Afrique du Sud. Un homme noir a le tort de rentrer chez lui à une heure qui n’est pas habituelle. Il trouve sa femme au lit avec un autre homme noir. Il n’est pas du genre à chercher la bagarre et se cache pendant que l’amant, se sentant repéré, part à peu près nu dans la rue. Reste son costume. Le mari salue cette veste et ce pantalon avec solennité, comme s’il s’agissait d’un être humain, et demande à sa femme de s’en occuper comme d’un ami précieux, de ne pas le quitter, de le bichonner, de le nourrir. Voilà la femme adultère contrainte de vivre non pas avec un amant mais avec son fantôme. C’est vite intenable. Mais le temps passe. Va-t-elle en mourir ou le mari, un jour, pardonnera-t-il ?

Cette pièce, tirée d’une nouvelle de Can Themba (qui, victime de la féroce censure de l’apartheid, devait mourir pauvre et assez jeune, exilé au Swaziland), Peter Brook l’avait déjà montée en version française. Il la reprend en anglais, dans une création à trois, sous l’impulsion de la rencontre avec le compositeur Franck Krawczyk, avec lequel il avait conçu un concentré (applaudi mais discutable) de La Flûte enchantée de Mozart. Vous avez bien lu : modestement, Brook signe et réalise la mise en scène avec deux partenaires, Marie-Hélène Estienne et Krawczyk. Humilité du génie ! Au moins cette fois. Car ce spectacle quasi collectif, fabriqué sans prétention, aux évidences simples et belles comme le jour, est un petit miracle. Le décor se résume à un tapis, trois portants et quelques chaises de couleur vive. Personne ne respecte les limites de la scène ainsi dessinée, à commencer par les musiciens, Astier, Champbouvet et Dupuis, qui s’amusent à surgir et à multiplier les facéties d’harmonistes de village. William Nadylam incarne le mari avec une ironie seigneuriale, Nonhlanhla Kheswa est une chanteuse impressionnante doublée d’une touchante comédienne, Rikki Henry joue avec malice le rôle plus discret de l’amant. C’est gai et déchirant, si loin de l’Occident par son irréalisme et si proche de nous par sa vérité humaine. Un chef-d’œuvre qui paraît tout bête et cache tant d’intelligence !

The Suit (Le Costume) d’après Can Themba, Mothobi Mutloatse et Banrey Simon, adaptation et mise en scène de Peter Brook, Marie-Hélène Estienne et Franck Krawczyk, lumières de Philippe Vialatte, éléments scéniques et costumes d’Ora Puppo, avec William Nadylam, Nonhlanhla Kheswa, Jared McNeill, Rikki Henry et les musiciens, Arthur Astier, Raphaël Chambouvet, David Dupuis. Bouffes du Nord, tél. : 01 46 07 34 50. Jusqu’au 5 mai. (Durée : 1 h 15).

Photo Pascal Victor/ArtcomArt

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

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1 Message

  • The Suit (Le Costume) d’après Can Themba 15 juillet 2023 19:00, par mveng

    bonjour,
    je suis Mveng et j’aimerais bien avoir cette nouvelle en français. Comment pourrais-je l’avoir ?
    Je vous remercie.

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