jusqu’en juin

Le Standard idéal, festival de la MC93

Une édition qui s’éclate hors ses murs

Le Standard idéal, festival de la MC93

Comme il n’est pas question que la MC 93, fermée pour travaux pour de longs mois, disparaisse des écrans radars, Patrick Sommier, son directeur a décidé de maintenir la manifestation la plus emblématique de ses visées artistiques, Le Standard idéal, festival conçu « comme une invitation à voyager aux quatre coins du monde, à une plongée théâtrale à travers d’autres langues dont les mystères et les saveurs ajoutent à ceux du théâtre ». Pour sa dixième édition, c’est aussi à une virée aux quatre coins de la banlieue parisienne qu’il nous convie, puisque programmée sur cinq « scènes amies » : le TGP de Saint Denis, le Nouveau Théâtre de Montreuil, le Théâtre 71 de Malakoff, Le Monfort à Paris et le Théâtre du Soleil à la Cartoucherie, qui accueilleront 15 spectacles venus notamment d’ Italie, de Russie, d’Ukraine, du Brésil, des USA, de France et de Chine .

Tout commencera le 4 mars au TGP de Saint Denis avec Pouilles une création de Amadeo Fago, celui qui avec son compère Fabrizzio Beggiato nous servait un Risotto aussi nostalgique que goûteux. Le voici qui quitte la cuisine pour le grenier, endroit fabuleux de la mémoire où se dénichent anciennes lettres, journaux intimes, vieilles photos que le temps a jaunies…tout un humus familial à partir duquel Amadeo Fago retrace l’histoire de l’Italie du début du siècle à nos jours. « Celle d’une Italie qui veut défendre sa culture et son art de vivre dans un pays où la modernité de pacotille diffusée par la télévision a remplacé Mona Lisa par Barbie » explique Patrick Sommier, pour qui, venu d’Italie, le spectacle « nous tend un miroir de ce que nous sommes ».

Être venus d’ailleurs et nous envoyer des échos d’ici, est le fil conducteur d’une programmation qui fait également la part belle à la musique. Ce sera : La Parola canta avec Toni et Peppe Servillo et le quatuor Solis qui, à travers poésies et mélodies napolitaines, propose un magnifique hymne amoureux à Naples. (12-13 mars au TGP et 14-15 mars Montreuil), K -Rio-K une revue musicale pour chanter le Brésil des années 20 et 30, (Montreuil 10 au 16 avril), Black rock coalition , venues de New-York quatorze chanteuses retracent l’histoire du rock noir américain de Nina Simone à Aretha Franklin, de Betty Davis à Grace Jones, (TGP du 3 au 5 juin), Dakh Daughters un « girl band », venu de Kiev, et composé de sept comédiennes, chanteuses, musiciennes « dont la palette va du punk à Tarass Boulba » et qui nous font entendre, entre autre, les paroles de Joseph Brodski, Charles Bukowski… (Montfort 20 avril)

C’est aussi au Monfort théâtre que le Standard idéal organise la rencontre pacifique de l’Ukraine et de la Russie du 7 au 18 avril. Tandis que sur la scène de la Cabane le collectif de Kiev de Vlad Troitskyi présente La Maison des chiens spectacle qui fait dialoguer le mythe d’Œdipe avec l’univers carcéral et conçu pour chambouler notre façon de regarder le théâtre, sur la grande scène, le russe Lev Dodine propose une version de La Cerisaie « moins en demi-teinte, plus farcesque et tragique que celle présentée il y a tout juste vingt ans à l’Odéon », précise Patrick Sommier pour qui Lev Dodine et son théâtre du Maly ont encore beaucoup de choses à nous dire . Et, parce qu’à ses yeux les propos qui traversent Gaudeamus spectacle sur la vie militaire créé en 1990, n’ont rien perdu de leur vertu que le directeur de la MC 93 a demandé à Lev Dodine de remettre la pièce sur le chantier avec une équipe de jeunes comédiens tout juste sortis de l’école car outre « l’ universalité du sujet, Gaudeamus est exemplaire de l’apprentissage et du savoir-faire des comédiens comme de l’art théâtral russe ».

A ceux qui s’étonnent de voir revenir régulièrement certains créateurs, Patrick Sommier rétorque que « la fidélité n’est pas une paresse, mais une éthique, une exigeante ligne de conduite qui permet aux jeunes artistes de s’affirmer et aux plus anciens de poursuivre leur dialogue avec le public et de l’élargir » ; c’est donc sous le signe de la fidélité que nous retrouvons à l’affiche de cette nouvelle édition, Jean-René Lemoine , « écrivain sensible et comédien hors pair » auteur et acteur d’une envoûtante Médée , spectacle qui « lève le voile sur tout ce qui vit au fond de nous, secrètement. Ce qu’il y a de plus enfoui, de plus viscéral ».

D’ici ou d’ailleurs il ne peut y avoir de théâtre, « une des dernières des ambassades de l’humain », sans comédiens. C’est pourquoi l’art de l’acteur, sa formation, ce qu’on lui demande d’exprimer à Moscou et à Shangaï sont également au cœur de cette dixième édition « qui s’attache plus aux différences qu’aux points communs ». C’est ainsi qu’au Théâtre 71 de Malakoff on pourra voir deux spectacles de l’école du Théâtre d’art de Moscou et notamment un passionnant travail autour du roman de William Faulkner, Le Bruit et la fureur (du 24 au 27 mars). Plus tard, au mois de juin du 26 juin au 6 juillet, moment idéal pour aller à la Cartoucherie où le Théâtre du Soleil accueille deux spectacles du Théâtre Liyuan qui nous embarquent non seulement dans l’ailleurs de l’espace, la Chine, mais aussi du temps, celui de la dynastie Ming. La première pièce La Grande Mélancolie une bouleversante histoire d’amour en même temps que « chef d’œuvre du répertoire traditionnel qui nous révèle le mieux les particularités du jeu de l’acteur dans le théâtre chinois », la seconde Une Femme chaste jette un regard « cru et dramatique sur le sort des femmes à travers la morale confucianiste et la répression du désir » Dans les deux pièces le rôle de l’héroïne est interprété par Zeng Jingping ,une des plus grande comédiennes de Chine.

En nous incitant une fois encore à la curiosité, par ses singulières découvertes autant que par ses retrouvailles le Standard idéal est de toute évidence un éclatant moyen d’affirmer hors les murs l’existence de la MC93.

Festival le Standard idéal : à partir du 4 mars-se poursuit en avril et juin

MC93 Hors les murs tel 01 41 60 72 72 www.mc93.com

Photos 1 "Gaudéamus" © Victor Vassiliev, 2" Dakh Daughters" ©D Dauggters, 3 "Une femme chaste" ©DR

A propos de l'auteur
Dominique Darzacq
Dominique Darzacq

Journaliste, critique a collaboré notamment à France Inter, Connaissance des Arts, Le Monde, Révolution, TFI. En free lance a collaboré et collabore à divers revues et publications : notamment, Le Journal du Théâtre, Itinéraire, Théâtre Aujourd’hui....

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