D’un festival à l’autre
Surabondants comme chaque été, les festivals français multiplient les soirées lyriques et les concerts en tous genres. Voici une petite sélection de grands moments qu’il serait dommage de manquer.
Commençons notre parcours le 5 juillet. Ce soir-là, la cour du magnifique hospice de Beaune accueillera L’incoronazione di Dario de Vivaldi (tous les opéras de Vivaldi sont des raretés) avec Anders Dahlin et l’Accademia byzantina dirigée par Ottavio Dantone. On aurait tort de négliger Amadis de Lully (le 13) sous la direction de Christophe Rousset, avec Cyril Auvity. Et, sous la direction de Paul McCreesh, L’allegro, il penseroso ed il moderato de Haendel (le 28).
Le 13 juillet, à Saintes, le Jeune orchestre atlantique (qui joue sur instruments anciens et peut être comparé au Jeune orchestre européen du Festival de La Côte Saint-André) dirigé par son fondateur Philippe Herreweghe jouera Mahler. Le 14, le chœur Aposiopée (qui mêle voix d’enfants et voix de jeunes filles) chantera Janacek. Le 17, Thomas Dunford jouera Dowland au luth. (A la fin de l’été, le 26 août, on fera un petit détour par Thiré, en Vendée, où Les Arts florissants joueront des Lamentations du baroque italien.)
On ne va certes pas à Aix-en-Provence pour s’enfermer dans le Grand Théâtre de Provence, mais quand Elektra (à partir du 10 juillet) est à l’affiche sous la direction d’Esa-Pekka Salonen, on ne résiste pas, d’autant que la mise en scène est de Patrice Chéreau. Evelyn Herlitzius chantera le rôle-titre et les nostalgiques des grandes heures du Festival de Bayreuth 1976 seront touchés de retrouver Franz Mazura et Donald McIntyre dans deux petits rôles. Beaucoup plus rare est l’Elena (à partir du 7 juillet) de Cavalli (1659), une histoire d’Hélène avant qu’elle soit « de Troie » dirigée par Leonardo Garcia. Plus intrigante encore est la création de The House Taken over (à partir du 6 juillet) de Vasco Mendonça, un opéra inspiré de Cortazar qui met en scène deux personnages : Sister and Brother. Ceux qui auraient manqué la production de Don Giovanni signée Dmitri Tcherniakov (affolant huis-clos !) pourront la retrouver (à partir du 5 juillet) dirigée par le grand Marc Minkowski.
Le théâtre antique d’Orange est à deux pas : on pourra se laisser tenter par Un ballo in maschera (les 3 et 6 août) dirigé par Alain Altinoglu (avec de remarquables rôles secondaires : Anne-Catherine Gillet, Nicolas Courjal, Jean Teitgen) et surtout par Der fliegende Holländer (le 12 juillet) dirigé par Mikko Franck, futur directeur musical de l’Orchestre philharmonique de Radio France. Ann Petersen sera Senta.
Restons dans le midi, mais un peu plus à l’ouest, avec le Festival de Radio France et Montpellier : 200 manifestations du 11 au 25 juillet, avec quelques raretés comme La Vivandière (1895), opéra-comique de Benjamin Godard (le 25), Madame Sans-Gêne de Giordano (le 19), le Concerto pour violon de Julius Conus (le 13). La Maîtrise de Radio France chantera le Livre Vermeil de Montserrat (les 19 et 20, version que l’on pourra comparer avec celle donnée dans le cadre du Festival de La Chaise-Dieu). Deux journées seront consacrées à la famille Viardot (les 15 et 16), et une (le 18) à l’Orchestre national de France. Avec bien sûr, à 12h30, les concerts de la série « Jeunes interprètes », par exemple le claveciniste Jean Rondeau, le 17.
Jean Rondeau qu’on pourra retrouver le 22 juillet à La Roque d’Anthéron où Abdel Rahman El Bacha jouera l’intégrale des Sonates pour piano de Beethoven (à partir du 27) et Lukas Geniusas celle des Préludes de Rachmaninov (le 27). Mais Scarlatti par Alice Ader, Couperin par Iddo Bar-Shaï (deux rendez-vous iconoclastes, le 30 juillet et le 11 août) et Albeniz par Luis Fernando Perez (le 18) méritent aussi un détour. Avec le 9 août, à partir de 19h, une Nuit du piano qui laissera « carte blanche à l’école française ».
Les amoureux de Messiaen se précipiteront pour aller entendre le Catalogue d’oiseaux joué Au pays de La Meije par Momo Kodama et Marie Vermeulin (les 27 et 28 juillet), et Harawi (le 30) chanté par Karen Vourc’h, avec Vanessa Wagner.
On a cité le Festival de La Chaise-Dieu : il est pourvu d’un nouveau directeur, Julien Caron. Musique portugaise (le 21 août), reconstitution de la messe de couronnement de George II par le King’s Consort (le 27), récital de Michael Levinas (Beethoven-Levinas, le 28), pages a capella de la Renaissance dans la délicieuse collégiale de Saint-Paulien (le 28), Livre Vermeil de Montserrat par la Camera delle lacrime (le 31) seront quelques jalons de l’édition 2013.
Une édition qu’on pourra conjuguer avec une escapade à La Côte Saint-André. Le festival consacré (en partie) à Berlioz propose notamment cette année Béatrice et Bénédict (le 23 août) dirigé par François-Xavier Roth à la tête du Jeune orchestre européen, dans une mise en scène de Lilo Baur.
ET AUSSI :
d’un festival... hors des sentiers battus...
par Caroline Alexander :
A ne pas manquer : à Marseille, dans le cadre de Marseille Provence, capitale de la culture 2013, le VIIIe Festival des Musiques Interdites dirigé par Michel Pastore présentera trois créations sur le thème de l’exil, de la mémoire et de l’oubli. Deux œuvres de compositeurs majeurs du XXe siècle, Erich Wolfgang Korngold et Jan Meyerowitz, tous deux taxés par les nazis d’être les auteurs de « musique dégénérée » (Entartete Musik), reprendront vie dans la Cour Intérieure de l’Hôtel de Préfecture des Bouches du Rhône. Du premier, grande figure musicale de l’Allemagne d’avant-guerre, puis de la musique de films dont il fut en quelque sorte l’initiateur à Hollywood, on découvrira le 6 juillet Die Kathrin, versus Zone Libre (par l’Orchestre de la Garde républicaine, direction Sébastien Billard). Du second, résistant juif réchappé du Camp des Milles on verra et entendra pour la première fois en France The Barrier versus Le Mulâtre, sa deuxième œuvre lyrique, centrée sur le racisme anti-noirs (avec Nicolas Cavallier et des chanteurs sud-africains). Entre ces deux pôles de mémoire, Karol Beffa, quarante ans, compositeur d’aujourd’hui, dédie en création mondiale son opéra-ballet Équinoxe à Franz Kafka (le 9 juillet en l’Église Saint-Cannat par l’Ensemble Contraste, direction de Johan Farjot). Rens. 06 87 71 42 82.
Pour les amoureux de la douceur périgourdine, le festival Musique en Périgord fête son vingt-cinquième anniversaire dans les villages d’Audrix, de Campagne et de Saint-Chamassy, dans les villes du Bugue, des Eyzies, de Saint-Cyprien et au cœur du Gouffre de Proumeyssac. Entre le 2 et le 16 août, carte blanche sera donnée à l’Orchestre de chambre Pelléas sous la direction de Benjamin Levy. Récitals, musique de chambre, concerts pour jeune public. Le choix est varié (rens. 05 53 30 36 09).
Hors frontières, il n’y a pas que Salzbourg et Bayreuth. A Innsbruck, capitale du Tyrol, lové au cœur des Alpes, se tient depuis trente-sept ans un festival entièrement consacré à la musique ancienne. Le baroque dans tous ses états, surtout les meilleurs, forme l’axe d’une programmation riche de contrastes. Le château d’Ambras, le Palais Impérial, l’abbaye de Wilten accueillent artistes et spectateurs. Le thème de l’année, « Aufbruch ! » (« En avant ! »), se veut en mouvement. Euridice de Caccini (par Rinaldo Alessandrini et son Conserto italiano), La clemenza di Tito de Mozart (par Alessandro De Marchi et son ensemble Academia Montis), Venus and Adonis de Blow, Dido and Aeneas de Purcell sous la férule du ténor Laurence Dale, le Concours Cesti, concours international d’opéras baroques, des concerts pour gastronomes de ces passerelles sonores qui relient la Renaissance au baroque (Castaldi, Karpsberger, de Visée, Jomelli, Hasse, Paisiello, di Lasso...). Du 7 au 25 août (rens. +43 (0) 512 561 561).
photo : Les Eyzies, quelque part dans le Périgord (dr)