Théâtre de la Commune d’Aubervilliers

Conversation chez les Stein sur Monsieur de Goethe absent

Les souffrances d’une maîtresse abandonnée

Conversation chez les Stein sur Monsieur de Goethe absent

Monsieur de Goethe est absent. Il est parti en Italie laissant sa maîtresse, Charlotte de Stein, éplorée. Madame de Stein se lamente de cet abandon auprès de... son mari. Cette liaison a commencé à travers une mission. Goethe, qui connut un succès foudroyant avec Les souffrances du jeune Werther en 1774, fut invité par le Duc de Weimar à lui tenir compagnie. Mais le jeune poète frise la muflerie et ses manières manquent terriblement d’élégance. Le Duc confie donc le trublion à la très distinguée Madame de Stein afin qu’elle lui inculque les rudiments de cour et les usages du monde. De maîtresse en décence, celle-ci devient maîtresse des sens. Une liaison de dix ans que Goethe rompra en prenant la fuite vers l’Italie.
Madame de Stein reste seule face à son époux. Elle raconte cette rencontre qui l’a fait entrer dans l’histoire de la littérature. Comment elle éduqua cet être prétentieux, fougueux, odieux, génial. Goethe entraîna cette femme délicate dans un torrent de passion, la poussant dans le vertige de l’amour.

Confession impudique

Charlotte connaît les tourments de la chair, l’ivresse des sens, mais aussi les incertitudes. Elle est bousculée, au propre comme au figuré, par un homme dérangeant, envoûtant, insupportable. Elle est animée par un sentiment incroyable : elle aime. Abandonnée par cet amant célèbre, elle est en proie à un désarroi abyssal, se livrant dans une confession impudique à son époux impassible.
Conversation chez les Stein sur Monsieur de Goethe absent est un monologue pour une comédienne écrit par l’auteur dramatique allemand Peter Hacks. Ce texte est un exercice enivrant. Bijou de problématique amoureuse, de bouleversement intime et social, l’écriture est superbe, poétique. Il pourrait être sous-titré : "Les souffrances de la vieille maîtresse abandonnée".

Sensuelle, tourmentée, vertigineuse

Christiane Cohendy est une comédienne dont le talent n’est plus à prouver. Et pourtant, le public est époustouflé par sa performance. Elle s’était déjà livrée au périlleux exercice "du seule en scène" avec le texte de Serge Valetti "Et puis, quand le jour s’est levé, je me suis endormie". En endossant le corset de Madame de Stein, elle se glisse dans le carcan d’une femme bouleversée par l’amour et le jeu social. Christiane Cohendy est sensuelle, tourmentée, vertigineuse. La mise en scène de Yves Beaunesne est parfaite, à tel point qu’on oublierait de la citer. Nous sommes dans le salon des Stein et, comme une caméra impudique, nous tournons autour de cette femme. Monsieur de Stein est de bois et de chair. Il est personnifié par une marionnette manipulée par Cyril Bourgois. Cette présence muette, témoin presque impénétrable de cet étrange confession, donne un son ouaté à cette conversation écoutée dans un silence admiratif.

Conversation chez les Stein sur Monsieur de Goethe absent. De Peter Hacks, traduction Jean-Louis Besson et Jean Jourdheuil. Mise en scène de Yves Beaunesne. Avec Christiane Cohendy. Manipulateur Cyril Bourgois.
Théâtre de la Commune d’Aubervilliers 01 48 33 16 16.

Photo : Guy Delahaye

A propos de l'auteur
Marie-Laure Atinault
Marie-Laure Atinault

Le début de sa vie fut compliqué ! Son vrai nom est Cosette, et son enfance ne fut pas facile ! Les Thénardier ne lui firent grâce de rien, théâtre, cinéma, musée, château. Un dur apprentissage. Une fois libérée à la majorité, elle se consacra aux...

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