Théâtre Ouvert jusqu’au 30 octobre

Le Mardi à Monoprix d’Emmanuel Darley

Telle quelle obstinément

Le Mardi à Monoprix d'Emmanuel Darley

Depuis quelques temps, pour tout dire depuis que Chantal, sa mère, n’y est plus, Marie-Pierre vient tous les mardis s’occuper de son père. Elle passe la journée chez lui, à faire le ménage, la lessive, le repassage, secouer la nappe, changer les draps, vider la poubelle, aérer. Chaque semaine, sans exception elle est là, près de son père, elle s’est organisée pour. Mais surtout, chaque mardi, elle va avec lui à Monoprix. Dans les rayons, à la caisse, tout le monde la regarde. Elle est belle Marie-Pierre avec sa robe à fleurs, ses ongles vernis et les yeux faits. Lui, le père « fait sa sale tête avec son béret et ses bretelles », prend ses distances comme s’il ne la connaissait pas. Elle, voudrait ne pas être venue, elle sent « les yeux de ceux là qui détaillent, scrutent, déshabillent, essayent de voir, d’imaginer ce qui dessous avant existait, avant que telle quelle, elle est désormais ». Devenue Marie-Pierre que son père trouve trop voyante et s’obstine à appeler Jean-Pierre. Marie-Pierre n’en finit pas de se heurter au regard des autres.

C’est en pensant à un tableau de Hopper qu’Emmanuel Darley a écrit ce « solo féminin pour acteur » (Ed Actes Sud-Papiers) dans lequel, derrière le rituel et les habitudes d’une journée et l’ordinaire des propos échangés résonnent tous les non- dits, les blessures du refus, les douleurs de la solitude.

L’acteur, c’est Jean-Claude Dreyfus, pour qui, parfois, tel l’Indien de Cocteau, « un peu trop c’est juste assez pour lui » et qui se révèle ici d’une étonnante et vibrante retenue. Corps massif et comme mal assuré sur ses hauts talons, il investit Jean-Pierre devenu Marie-Pierre avec une infinie délicatesse.
Finement dirigé par Michel Didym qui le met en scène, accompagné en direct par le contrebassiste Philippe Tibault, Jean-Claude Dreyfus donne toute son intensité à un texte qui fait l’économie du pathétique et dont la violence se masque de sourire et de poésie. Épatant !

Le Mardi à Monoprix, de Emmanuel Darley, mise en scène Michel Didym avec Jean-Claude Dreyfus - 1h30 -
Théâtre Ouvert jusqu’au 30 octobre.
Tel : 01 42 55 74 40.

A propos de l'auteur
Dominique Darzacq
Dominique Darzacq

Journaliste, critique a collaboré notamment à France Inter, Connaissance des Arts, Le Monde, Révolution, TFI. En free lance a collaboré et collabore à divers revues et publications : notamment, Le Journal du Théâtre, Itinéraire, Théâtre Aujourd’hui....

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