Le Poisson combattant
Pensées vagabondes
Fabrice Melquiot est un auteur trop rare sur nos scènes. Ses textes enchantent par un mélange singulier de réalisme et de poésie. Expert dans l’analyse de l’intime, il écrit aux antipodes de tout intellectualisme et les situations concrètes sont transmuées par l’écriture en une véritable fabrique d’images. Son Poisson combattant est exemplaire de son style libre et irrigué de fantaisie grave. Au départ une situation simple : un homme quitte sa femme et sa petite fille. Loin de nous raconter les péripéties de cette séparation, Melquiot nous plonge dans le flux de ses pensées vagabondes. Tel le poisson combattant qui a brutalement sauté hors de son aquarium, le narrateur a enjambé le bastingage de sa vie conjugale avec pour seul but de trouver une sépulture au poisson. On est embarqué dans l’avalanche tumultueuses des images au sens propre (très belles videos d’avalanches qui semblent s’abattre sur la scène) et au sens métaphorique. Tel le saumon qui remonte à la source pour frayer, le narrateur remonte le cours agité de ses pensées, de sa vie, dans un flot d’images étonnantes. Au terme du voyage, il comprendra que toute séparation est regénération, promesse de vie, à l’instar du poisson combattant qui se ressource dans les eaux claires des origines.
La mise en scène de Melquiot est simple, nourrie de belles vidéos et Robert Bouvier porte haut ce texte écrit à son intention, dont l’épilogue achève de cueillir l’émotion du spectateur.
Le Poisson combattant de Fabrice Melquiot, mise en scène de l’auteur ; scénographie et costumes Elissa Bier ; univers sonore Julien Baillod ; lumières Matthias Roche ; video Janice Siegrist. Festival d’Avignon, théâtre Girasole à 19h15. Durée : 1h15. Tel. 0490898263.
photo : Cosimo Terlizzi