Le Guichet Montparnasse (Paris)

Taisia la pipelette

Pouvoir dire

Taisia la pipelette

La clé de la réussite pour un spectacle qui s’adresse à un jeune public, c’est de faire appel au pouvoir d’imagination que possède chaque enfant. Encore faut-il le faire avec délicatesse. C’est une alchimie que ce spectacle compose à merveille. Mais il fait mieux. A sa manière, il leur fait toucher du doigt à quel point ce langage, qu’ils ne cessent de découvrir, est un bien précieux.

C’est l’histoire d’une petite fille qui parle beaucoup, trop peut-être, à tel point qu’on l’a surnommée "Pipelette". Elle n’est pas sans nous rappeler certains adorables petits bavards qui nous font parfois soupirer : "mais tu ne vas pas te taire à la fin !?". Justement si... Cette petite fille-là perd l’usage de la parole à la suite d’un traumatisme. Heureusement, sa malice et sa force de caractère restent intactes. Celle que l’on appelle désormais Taisia brave la peur et le danger pour tenter de retrouver la parole. Sa quête la mène au cœur d’une forêt magique. Elle y découvre d’autres formes d’expressions qui, elles, n’ont pas besoin des mots. Elle mesure ainsi ce que représente le langage universel, celui du cœur.

Une petite fille rigolote

Sur un coin de la scène, William Malatrat est tour à tour conteur, musicien, bruiteur, ou même papa paléontologue. Il fait plus que donner le rythme du spectacle. Il lui donne ses couleurs, à travers les sons, la voix et le propos qu’il emploie : de la douceur à la détresse, de la plaisanterie à la poésie, de la langueur à la frénésie. A ses côtés, Lucie Hann interprète Taisia la Pipelette. Dès son entrée sur scène, le public a les yeux rivés sur elle, fasciné par cette petite bonne femme. Comme s’il ne s’agissait plus d’une comédienne adulte mais bien d’une petite fille rigolote, avec ses couettes et ses taches de rousseur ! Tout en elle est enfantin : son attitude, son rire, ses manières, ses intonations et même les expressions de son visage. C’est l’étonnante interprétation de Lucie Hann, dans la peau d’une enfant, qui rend si palpable ces petits riens qui composent le quotidien de Pipelette. Les enfants rient de bon cœur quand elle raconte sa journée ordinaire - l’école, les devoirs, le dîner, etc. - tant ils se sentent proche de cette petite fille. Çà et là, ce sont les mamans qui s’amusent aussi des facéties de Pipelette, ressemblant drôlement à celles de leurs petits.

Un langage universel

Dans la seconde partie du spectacle, placée sous le signe de l’aventure et de la découverte, une voix questionne Taisia et avec elle, c’est le public qui s’interroge. On découvre alors la diversité des modes d’expression et le pouvoir du langage universel. Il est peu probable que les plus jeunes enfants en mesurent toute la portée philosophique. En revanche, ce que leur fait sans aucun doute ressentir ce spectacle, c’est le tourment qui peut s’emparer d’un enfant victime d’un traumatisme tel que la perte de la parole. Ce spectacle leur permet en outre de mesurer à quel point le langage, cet acquis pourtant si naturel, est précieux.

La richesse des images

On ne peut s’empêcher d’imaginer ce que serait un tel spectacle s’il disposait de plus de moyens : peut-être y aurait-il des arbres en carton-pâte pour figurer la forêt magique, quelques pupitres pour représenter l’école ou bien des éléments mobiliers pour la maison de Taisia. Ici, rien de tout de cela, juste deux personnages seuls sur une toute petite scène nue. Par la seule force d’évocation, les deux comédiens parviennent à créer les éléments foisonnants et les lieux divers de cette jolie histoire. Le silence attentif des enfants et leur regard captivé témoignent de la richesse des images qu’ils devinent. Et c’est précisément là que réside toute la force de ce spectacle : il sait faire appel à ce pouvoir d’imagination que possède chaque enfant.

Taisia la Pipelette. Conception, écriture et interprétation : Lucie Hann et William Malatrat. Création musicale et mise en scène : William Malatrat. Théâtre le Guichet Montparnasse. Réservation au 01 43 27 88 61. 15, rue du Maine 75014 Paris. M° Gaîté ou Montparnasse. Du 7 janvier au 22 avril 2006. Les mercredis et samedis à 16h00.

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Najett Maatougui

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