Seuls de Wajdi Mouawad

Solo

Seuls de Wajdi Mouawad

Wajdi Mouawad avait écrit ce solo en 2008, avant Le Sang des promesses, quatuor pour une foule d’acteurs et de personnages créé en 2009. Ce spectacle répond, entre autres, à un besoin de prendre des distances provisoires avec les acteurs, comme « des parents exténués par leurs enfants vont prendre des vacances « seuls » pour retrouver un état amoureux avec la vie ».

Dans Seuls, au-delà de la question identitaire qu’il semble vouloir reléguer au second plan, sans la nier pour autant, il s’interroge sur sa capacité à s’enflammer, à résister au monde normatif qui broie nos ailes de géants. Lesté du poids des questions existentielles les plus aiguës et en même temps les plus banales, notre lot commun et solitaire (seuls, toujours), il part en quête de ses rêves, du geste créateur qui fait advenir ces mondes exubérants de vitalité nés de sa plume, à la rencontre de sa langue maternelle, l’essence même de son être. Wajdi alias Harwan, étudiant montréalais sur le point de soutenir sa thèse, tombe dans le coma comme on entre dans les rêves au cours d’une cure psychanalytique. Avec acharnement, il questionne la relation père/fils, sa relation à l’art (hommage au Québécois Robert Lepage) qu’il bouscule et remet en question sans ménagement.

Dans un mouvement enfiévré, entièrement barbouillé de peinture, il déchire la toile du Retour du fils prodigue de Rembrandt dont il s’est fait lui-même le sujet pour disparaître de l’autre côté du miroir. Au début du spectacle, petit homme maladroit à la silhouette adolescente, s’excusant d’être là sur le plateau, d’exister, il reconquiert son statut d’artiste à mains nues et sa place dans le monde. Absorbé par l’art, il renaît de ses cendres. Et toujours, par la grâce de cette langue généreuse et dense, il nous prend par la main pour nous faire traverser mille ans d’histoires tissées d’amour et de haine. Le pari audacieux de ce solo s’avère une réussite humaine et artistique unique qui transcende nos solitudes, justement.

Seuls de et avec Wajdi Mouawad, au Théâtre national de la Colline du 23 septembre au 9 octobre à 20h30, mardi à 19h30, dimanche à 15h30. Durée : 2 heures. Tel : 01 44 62 52 52

Crédit photo : Thibaut Baron

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

Voir la fiche complète de l'auteur

Laisser un message

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

S'inscrire à notre lettre d'information
Commentaires récents
Articles récents
Facebook