Paris, théâtre national de la colline jusqu’au 4 février 2012

Salle d’attente de krystian Lupa

Nos frères humains

Salle d'attente de krystian Lupa

Catégorie 3.1 c’est le nom de la case réservée aux cas sociaux dans les formulaires de l’administration suédoise, la désignation officielle des laissés-pour-compte de la société. Lars Noren s’est intéressé à cette sous-classe sociale qui ne mérite même pas un nom dans une pièce fleuve bouleversante de sept heures que Jean-Louis Martinelli avait magistralement mis en scène en 2000. Krystian Lupa s’est inspiré de cette plongée dans les bas-fonds de la société dans un spectacle ambitieux qui reste démonstratif. Les acteurs manquent peut-être d’expérience pour investir une histoire aussi dense, d’autant plus qu’ils ne sont pas portés par le texte fort de Noren puisqu’ils ont travaillé à partir d’improvisations.

Dans un sous-sol glauque, humide, taggé à souhait, où l’on devine les odeurs d’urine et d’humidité mélangées, se côtoient deux junkies, un alcoolique, une poétesse psychotique, un dealer, un écrivain paranoïaque, un baba cool obsédé sexuel, un ex-chef d’entreprise qui a pété un câble à la suite de la mort de sa fille, une prostituée. Ensemble et seuls, abandonnés à leur sort, ils vivent comme en suspension, dans une attente indéfinissable et tragique. Le spectacle de leur déchéance est cru et d’une grande violence, et pourtant, là où Martinelli touchait au cœur et secouait nos torpeurs intellectuelles, on ne voit qu’une galerie de portraits de jeunes en déshérence, même si on comprend qu’on veut nous tendre un miroir où l’on devrait s’entrevoir et s’effrayer. L’impression de stéréotype, jusque dans l’extravagance des costumes, a édulcoré la gravité, l’humanité, la complexité qui faisait de la mise en scène de Martinelli un spectacle exceptionnel. Peut-être eût-il fallu s’affranchir franchement du texte de Lars Noren, qui, d’une certaine manière, fait de l’ombre à cette intéressante aventure théâtrale conduite avec de jeunes acteurs.

Salle d’attente librement inspiré de Catégorie 3.1 de Lars Norén, texte, scénographie, lumière et mise en scène de Krystian Lupa. Avec Anthony Boullonnois, Audrey Cavelius, Claire Deutsch, Thibaut Evrard, Pierre-François Garel, Adeline Guillot, David Houri, Aurore Jecker, Charlotte Krenz, Lucas Partensky, Guillaume Ravoire, Lola Riccaboni, Mélodie Richard, Alexandre Ruby, Matthieu Sampeur. Au théâtre national de la colline du 7 janvier au 4 février 2012. Du mercredi au samedi à 20h, le mardi à 19h30et le dimanche à 15h. Durée 3h10. tel : 01 44 62 52 52.

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

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