Le Tour du théâtre en 80 minutes de et par Christophe Barbier
Du journalisme aux planches
Si on évoque un journaliste et son éternelle écharpe rouge tout le monde sait immédiatement de qui il s’agit. Mais qui sait que cet ancien directeur de l’Express, qu’on voit encore sur les plateaux télé, est un fou de théâtre qu’il pratique en amateur depuis trente ans ? Un véritable passionné qui connaît l’histoire et les coulisses du théâtre comme sa poche— il a publié en 2015 Le Dictionnaire amoureux du théâtre (Plon). De là à monter sur les planches il n’y avait qu’un pas, possibilité offerte par un autre ancien de la presse, Philippe Tesson, dans son Théâtre de poche. Le spectacle, conçu à partir des définitions du Dictionnaire amoureux, se présente en deux parties très distinctes. En costume XVIIIe siècle, il propose d’abord un tour d’horizon de grandes questions (qu’est-ce que le théâtre, qu’est-ce que jouer ?) et des mots du théâtre, agrémenté de quelques anecdotes ou explications amusantes et instructives, de citations, de Guitry à Terzieff, d’extraits de pièces célèbres. Exercice dans lequel il n’est pas parfaitement à l’aise, maîtrisant mal le rythme, oubliant que, comme en musique, le discours est fait de silences.
Dans la seconde partie Christophe Barbier est plus à son affaire, plus délié. Il a abandonné le costume d’époque pour le costume de ville et l’écharpe rouge aussi légendaire que le célèbre panache blanc. En un temps record, il retrace les principales étapes de l’histoire du théâtre. Mais là encore, voulant tout dire, et un peu sur le même ton, sans se soucier trop de théâtralité, il laisse le spectateur étourdi par une avalanche d’informations, d’anecdotes, d’analyses, toutes passionnantes mais emportées dans le flot impétueux de la parole. C’est dommage car il ne faudrait pas grand-chose pour que le spectacle prenne plus de relief et de corps ; il y avait là de la matière pour plusieurs spectacles qui aurait gagné à plus d’homogénéité. Il n’en reste pas moins que le fil rouge (comme l’écharpe) est éminemment intéressant. Le spectacle montre les liens entre théâtre, politique et religion au fil des siècles. Un regret : probablement pour ménager l’effet de la chute finale, Barbier déclare que la politique a déserté le théâtre, ce qui est loin d’être exact et ne concernerait peut-être que les années 1980. Aujourd’hui les spectacles ont très souvent une portée politique. Si Christophe Barbier n’évite pas toujours certains écueils, malgré l’utile regard extérieur de Charlotte Rondelez, son projet est passionnant à plus d’un titre et remarquablement documenté.
Le Tour du théâtre en 80 minutes de et par Christophe Barbier, sous le regard de Charlotte Rondelez. Au théâtre de poche les lundis à 19h jusqu’au 9 juillet. Résa : 01 45 44 50 21.
© Pascal Gély