Le Festival d’Avignon 2012

En toute complicité...

Le Festival d'Avignon 2012

Ce n’est pas moins de 36 spectacles que nous propose cette 66è édition du Festival d’Avignon. Elle est conçue avec et autour de l’acteur metteur en scène britannique Simon McBurney pour qui le théâtre se doit « d’être un lieu d’invention et d’engagement ».

Sans doute plus connu du grand public comme acteur – on l’a vu récemment dans le film La Taupe , mais on a pu le voir également dans un Harry Potter ou encore un des épisodes de L’Inspecteur Barnaby  -, Simon McBurney qui, après sa formation chez Jacques Lecoq, a fondé à Londres le Théâtre de Complicité, aime à transgresser les frontières artistiques et fut l’un des premiers à mêler nouvelles technologies et littérature, les images et les sons, les mots et les corps. Rien d’étonnant dès lors qu’il choisisse pour frapper les trois coups du Festival d’adapter une œuvre qui transgresse les lieux, le temps et les formes : Le Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov.

Si, comme aimait à le dire Jean Vilar, Shakespeare et ses tumultes vont bien à la Cour d’Honneur, on imagine volontiers que la tumultueuse et folle histoire qu’est Le Maître et Marguerite lui ira comme un gant. Quoi de plus approprié en effet que le mur du Palais des Papes pour faire résonner cette œuvre foisonnante et iconoclaste qui enlace le ciel et la terre, Jésus et le diable, le burlesque et le fantastique, la critique sociale et politique.
Aussi, c’est avec une gourmande curiosité qu’est attendue la rencontre de l’imaginaire vertigineux de Boulgakov avec celui de McBurney que la France a découvert à la MC 93, avec cette polyphonique et splendide virée dans le passé de l’ humanité qu’était Mnémonic .

Bien d’autres propositions alléchantes émaillent cette nouvelle édition qui allie le laboratoire et la séduction et enfonce le clou du mixage des genres pour parler du présent . En ce domaine, on retrouve quelques grandes pointures familières du Festival : Christoph Marthaler (My Fair lady, un laboratoire de langue), Roméo Castellucci (The Four seasons restaurant) ou encore Thomas Ostermeier qui à travers une adaptation « radicale » de la pièce d’Ibsen Un ennemi du peuple soulèvera quelques problèmes écologiques à l’ordre du jour, tel celui de l’eau.

Pour leur part, le lyonnais Bruno Meyssat avec 15% et l’allemand Nicolas Stemann à partir du texte de Elfriede Jelinek Les contrats du commerçant, une comédie économique aborderont, chacun à leur manière, les dérives des systèmes financiers. Le Mapa Teatro de Bogota parlera lui, des violences en Colombie et celles du Liban seront sur la sellette avec « 33 tours et quelques secondes » de Lina Saneh et Rabi Mroué.

Il y aura des auteurs d’aujourd’hui pour parler d’aujourd’hui tels Guillaume Vincent (La Nuit tombe) et Christophe Honoré ( La Faculté et Un jeune se tue), mais aussi des classiques contemporains avec La Mouette de Tchékhov que met en scène Arthur Nauzyciel avec Dominique Reymond dans le rôle d’Arkadina et Six Personnages en quête d’auteur de Pirandello sous le regard acéré de Stéphane Braunschweig.

C’est en toute « complicité » que Simon McBurney retrouvera dans la Cour d’Honneur l’écrivain britannique John Berger, comparse et ami, pour une lecture à trois voix du roman d’amour épistolier de celui-ci De A à X . Un peu plus tard, l’auteur et sa fille, Katia Berger, se livreront à une réflexion autour d’une fresque du peintre de la Renaissance, Andrea Mantegna.

Côté danse, Sidi Larbi Cherkaoui, Josef Nadj, Olivier Dubois, Régine Chopinot, Nacera Belaza nous proposeront des spectacles qui, à travers la variété des styles et des compositions, nous interpelleront « sur ce qui nous rassemble et nous distingue ».

Alors que de Chaillot à Sète, on célèbre le centenaire de Jean Vilar, le Festival se devait de rendre hommage à son père fondateur, ce qu’il fera en grand et sur la place du Palais des Papes le 14 juillet, avec un spectacle tissé d’images d’archives , de témoignages, de musique et concocté par la compagnie KompleXKapharnaüM. Ce sera festif et impertinent et l’occasion sans doute de revivre quelques grandes heures du Festival et de se rappeler que Vilar a su faire d’Avignon un vaste chantier où se repensait sans cesse la création et le rapport au public, qu’il a lui-même tracé la voie de la diversité et du métissage en ouvrant le premier le Festival à la danse, la musique, au cinéma comme aux auteurs contemporains. A leur manière, Hortense Archambault et Vincent Baudrier inscrivent leur présent programme sur ces traces-là, tant il est vrai que les créateurs invités aujourd’hui peuvent, à l’instar de Jean Vilar hier, dire « Je fais pour mon époque le théâtre de mon temps ».

Pour sa part, le Festival Off, qui n’a pas encore fait connaître la totalité de son programme, aligne, cette année, ses dates sur celles du Festival In.

Crédit photo CMJN dessin William Kantridge

A propos de l'auteur
Dominique Darzacq
Dominique Darzacq

Journaliste, critique a collaboré notamment à France Inter, Connaissance des Arts, Le Monde, Révolution, TFI. En free lance a collaboré et collabore à divers revues et publications : notamment, Le Journal du Théâtre, Itinéraire, Théâtre Aujourd’hui....

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