Fair-play de Patrice Thibaud

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Fair-play de Patrice Thibaud

Patrice Thibaud et Philippe Leygnac reprennent ce spectacle créé en 2012 qui fait suite à l’irrésistible Cocorico et à Jungles. Thibaud et Leygnac se sont rencontrés dans les spectacles de Jérôme Deschamps et Macha Makaïef et ont créé un tandem épatant. Ces deux-là sont faits pour s’entendre, le grand Thibaud a la stature de Jacques Tati, son maître avoué (l’idée de ce spectacle serait née des Impressions sportives de Tati), le petit Leygnac à la mine triste et impassible évoque Buster Keaton. Côte-à-côte, c’est Laurel et Hardy.
Philippe Leygnac entre en scène en escaladant son piano par la face nord pour rejoindre sa banquette. Il a composé la musique pleine de références ; trompettiste, il joue du piano, des percussions, chante et accompagne les extravagances de son compère dont il se fait le complice, version moderne de l’Auguste et du clown blanc.
Dans le cadre de la manifestation symbolique des JO, le spectacle débute par le port de la flamme olympique qui dégénère de passage en passage. Un des principes comiques mis en œuvre par Patrice Thibaud, commun à tous les grands de Chaplin à Keaton, en passant par Tati (dont on reconnaît l’impayable univers sonore), consiste à faire dériver à grande vitesse une situation initiale. Sur la scène transformée en gymnase, stade, ring de boxe, bains de vapeur — clins d’œil à De Funès et Bourvil dans La Grande Vadrouille  —, ils brocardent gentiment le monde du sport, ses rêves de gloire et ses descentes aux enfers, sa rigueur excessive qui brise les corps ; excepté le fantasme du corps idéal, le sportif connaît les mêmes excès que l’artiste, affres ou délices, souffrance ou gratification de l’ego.
En ce début d’Euro, le spectacle tombe à pic. L’arbitre au bord du terrain est croqué plus vrai que nature. Les numéros de mime de Patrice Thibaud, très chorégraphiés, s’enchaînent à grande vitesse et à chaque fois, en quelques touches, les images surgissent et font mouche : irrésistible numéro d’équitation où l’on ne distingue plus la monture du cavalier, hilarante prestation féminine de GRS. Le rire cède parfois la place au pathétique ; désespoir de l’athlète humiliée par son échec ou dérive du boxeur détruit par la drogue, violence d’un monde sans pitié, trop souvent miroir aux alouettes.
Un spectacle virtuose, enlevé et joyeux qui épingle les excès engendrés par l’esprit de compétition ; le titre tient d’ailleurs de l’anti phrase car le fair-play est généralement incompatible avec l’esprit de compétition.

Fair-play, un spectacle de et avec Patrice Thibaud et avec Philippe Leygnac
Mise en scène Jean-Marc Bihour, Jean-Michel Guérin, Patrice Thibaud. Musique
Philippe Leygnac. Dramaturgie, Marie Duret Pujol. Lumières, Charlotte Dubail. Costumes, Isabelle Beaudoui. Au théâtre du Rond-Point jusqu’au 3 juillet 2016 à 18h30. Résa : 01 44 95 98 00.
www.theatredurondpoint.com

Photo Rébecca Josset

4-5 octobre 2016
Scène Nationale / Bayonne (64)
4 mars 2017
Le Safran Métropole / Amiens (80)
21-22 mars 2017
Théâtre Edwige Feuillère / Vesoul (70)

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

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